Hostname: page-component-848d4c4894-4hhp2 Total loading time: 0 Render date: 2024-06-09T00:24:52.686Z Has data issue: false hasContentIssue false

Lancelot : préhistoire d'un héros arthurien

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Dominique Boutet*
Affiliation:
École Normale Supérieure

Extract

Lancelot, le plus illustre peut-être des chevaliers de la Table Ronde, conserve sa part de mystère. A la différence de Keu ou de Gauvain, il est inconnu de Wace comme de Geoffroy de Monmouth ; il n'a pas, comme Yvain, Erec ou Perceval, un homologue gallois qui serait, comme Owen, Geraint ou Peredur, l'objet d'un conte identifiable. Chrétien de Troyes est, avec la source française du Lanzelet d'Ulrich von Zatzikhoven, le premier à le mentionner et à lui donner de l'importance. Le xiiie siècle, avec la vaste fresque du « Lancelot-Graal », en fera, avant Tristan, le héros de la plus grande entreprise littéraire de cette époque.

Summary

Summary

The variety of hypotheses put forward thus far to explain Lancelot's origins seem unsatisfactory as they fail to shed light in a coherent way on a number of important points, and do not permit us to understand why scattered themes cristallized around one and the same character. A comparative examination with the Scandinavian god, Heimdallr, and with the Indian hero, Bhisma (counterparts of the Irish god, Lug according to G. Dumézil) allows us to detect correspondences and even to explain why it was Lancelot, and not Perceval or any other hero who was chosen by the authors of « Lancelot - Graal » in the 13th century as the hero of the first vast novelistic fresco of the French Middle Ages. It is thus probable that Lancelot constitutes a full-fledged example of a type of Indo-European god or hero found in Ireland, Wales, India and Scandinavia.

Type
Histoire Religieuse
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1989

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

Notes

1. Cf. Les Mabinogion, trad. J. Loth, Paris, 1913, t. 2 ; Le Chevalier de la charrette, M. Roques éd., Paris, Champion, C.F.M.A., 1975 ; etLanzelet, eine Erzählung von Ulrich von Zatzikhoven, K. H. Hahn éd., Francfort/Main, 1845. Par commodité, on citera la traduction anglaise : Lanzelet (traduit par K.G.T. Webster, Introd. et notes par R.S. Loomis), New York, 1951.

2. R.S. Loomis, Celtic Myth and Arthurian Romance, 1927, et Arthurian Tradition and Chrétien de Troyes, New York, 1959, pp. 190-192.

3. Cf. aussi son introduction à la traduction anglaise du Lanzelet.

4. Édition citée, p. 193.

5. Harf, L., « Lancelot et la Dame du Lac », Romania, t. 105, 1984, pp. 1633 CrossRefGoogle Scholar.

6. Cf. les références de l'ensemble de ces travaux dans L. Harf, art. cit.

7. Rank, O., Le mythe de la naissance du héros, trad. frse, Paris, 1983 Google Scholar.

8. L. Harf, art. cit., p. 28.

9. Ibid., p. 32.

10. Lancelot, A. Micha éd., Genève, Droz, t. V, pp. 114-115.

11. Ibid., t. VII, p. 1.

12. Ch. Mêla, La Reine et le Graal, Paris, Éditions du Seuil, 1984, p. 350.

13. M.-L. Chênerie, « L'anonymat de Lancelot du Lac dans les préludes d'une carrière héroïque », Littératures, n° 11, 1984, pp. 9-16.

14. Édition citée, et surtout traduction anglaise, op. cit.

15. Paris, G., « Études sur les romans de la Table Ronde », Romania, t. 10, 1881, pp. 465496 CrossRefGoogle Scholar ; ici, p. 472.

16. Cf. en particulier son introduction à la traduction anglaise du Lanzelet, pp. 15-18 ; et « The Descent of Lancelot from Lug », Bulletin bibliographique de la Société arthurienne, 1951, pp. 69-73.

17. Op. cit., v. 1856-1936.

18. Op. cit., p. 96. La scène correspond aux vers 5180-5200 du poème.

19. G. Dumézil, Mythe et épopée, II, 1971, p. 335.

20. Cf. d'Arbois de Jubainville, H., Le cycle mythologique irlandais, Paris, 1884, p. 294 ss.Google Scholar

21. Ibid., p. 298.

22. Idem.

23. Micha éd., t. IV, chap. Lxxvm, 48-58.

24. H. d'Arbois de Jubainville, op. cit., p. 304

25. Mabinogion, trad. cit., t. 1, p. 191.

26. Ibid.,t. l,pp. 193-199.

27. Dumézil, G., L'Oubli de l'homme et l'honneur des dieux, Paris, Gallimard, 1985, pp. 93111 Google Scholar.

28. Micha éd., t. VII, chap. xxn a, 12, puis xxrv a, 31-32.

29. Lanzelet, op. cit., p. 29.

30. Ibid., p. 29.

31. H. d'Arbois de Jubainville, op. cit., p. 381.

32. Il y a, fondamentalement, le thème du péché des pères : cf. Ch. Mêla, op. cit., p. 331 et 383-412.

33. H. d'Arbois de Jubainville, op. cit., pp. 210-214.

34. Dumézil, G., « Remarques comparatives sur le dieu Scandinave Heimdallr », Études celtiques, VIII, 1959, p. 283, n. 1Google Scholar.

35. G. Dumézil, Mythe et épopée, I, pp. 178-180.

36. Ibid., p. 182.

37. Ibid., p. 181.

38. G. Dumézil, art. cit., et Mythe et épopée, I, pp. 182-190.

39. G. Dumézil, art. cit., pp. 268-269.

40. G. Dumézil, Mythe et épopée, I, p. 185.

41. La Queste del saint Graal, A. Pauphilet éd., Paris, Champion, C.F.M. A., 1980, pp. 277- 278.

42. G. Dumézil, art. cit., p. 270.

43. Ibid., p. 272.

44. Ibid., p. 272 et 273.

45. Cité par G. Dumézil, art. cit., p. 275.

46. Ibid., pp. 280-283. Citations pp. 282-283.

47. Queste del saint Graal, op. cit., p. 130 ss. Voici le texte original : « A cel tens fu avis au roi Ewalac que d'un suen neveu, filz Nascien, issoit un grant lac, en tel maniere qu'il li issoit del ventre. Et de cel lac issoient nuef flum dont li uit estoient d'une grandor et d'une parfondece. Mes cil qui ert le darreains estoit de lé et de parfont plus grant que tuit li autre, et estoit si rades et si bruianz qu'il n'estoit riens qui le poïst soffrir. Cil fluns ert troubles ou comencement et espés come boe, et el mi leu clerz et nez, et en la fin d'autre manière : car il estoit a cent doubles plus biaus et plus clers que au comencement, et si douz a boivre que nus ne s'en poïst saouler. Tiex estoit li darreains des nuef fluns » (p. 135).

48. Ibid., p. 71.

49. Cf. G. Dumézil, Mythe et épopée, I, p. 185, n. 1 : « Dans l'Inde, c'est un autre dieu premier, le Daska épique, qui reçoit une tête de bélier. » Pour le domaine celtique, cf. par exemple Duval, P.-M., Les dieux de la Gaule, Paris, Payot, 1976, pp. 3739 et p. 70Google Scholar.

50. G. Dumézil, art. cit., pp. 265-266.

51. Dumézil, G., Mythe et épopée, I, p. 184 Google Scholar.

52. La Mort le roi Artu, J. Frappier éd., Genève, Droz, 1980, pp. 262-263.

53. M. Dillon, N. Chadwick et C. Guyovivarc'h, Les royaumes celtiques, Trad. frse, Paris, Fayard, 1974, p. 152.

54. G. Dumézil, Mythe et épopée, I, p. 222.

55. Mort Artu, pp. 225-226 : « Ah ! sire, quelle douleur et quel dommage de vous voir ainsi précipiter votre fin ! […] Sire, faites appel à Lancelot ; car sachez-le, s'il est auprès de vous, jamais Mordret ne parviendra à vous résister ; mais si vous ne l'appelez pas en ce péril, vous ne pourrez échapper à la mort. »

56. Cette hypothèse n'est nullement incompatible avec celle qu'avait formulée L. Harf (art. cit.) ; elles expliquent chacune un moment différent de la mise en place de la légende. Le mythe indo-européen (ou ses débris) a sans nul doute été transformé, ré-interprété (au xiie siècle ?) à la lumière des schémas du folklore et du symbolisme celtique pour donner naissance aux œuvres que nous lisons.