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La Guerre du Golfe et le système d'intervention armée de l'ONU

Published online by Cambridge University Press:  09 March 2016

Katia Boustany*
Affiliation:
Département des sciences juridiques, UQAM
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Abstract

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Notes and Comments / Notes et commentaries
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Copyright © The Canadian Council on International Law / Conseil Canadien de Droit International, representing the Board of Editors, Canadian Yearbook of International Law / Comité de Rédaction, Annuaire Canadien de Droit International 1991

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References

1 Sur l’ensemble de ces données, cf. Salinger, Pierre et Laurent, Eric, Guerre du Golfe, éd. Olivier Orban, Paris, janvier 1991.Google Scholar

2 Déjà durant la période entre les deux Guerres mondiales, des factions nationalistes en Irak avaient avancé des revendications sur le Koweit. La position irakienne à cet égard sera réitérée au moment de l’accession du Koweit à l’indépendance, en 1961, et se base juridiquement sur le caractère illégal, selon l’Irak, de l’Accord Anglo-Kowei-tien de 189g. Par ce traité, le Cheikh du Koweit, malgré les protestations de Constantinople, s’engageait à ne céder aucune parcelle de son territoire sans le consentement de Londres. Lorsque la Guerre a été déclarée entre la Grande-Bretagne et la Turquie, en 1914, la Principauté du Koweit s’était vu accorder une reconnaissance comme gouvernement indépendant sous protection britannique. Avec le démantèlement de l’Empire Ottoman, au lendemain de le Première Guerre mondiale, les anciens districts de Mossoul, Bassorah et Bagdad, qui formaient une partie de la Mésopotamie, étaient fusionnées ensemble pour constituer le Royaume d’Irak sur lequel la Grande-Bretagne avait reçu Mandat de la Société des Nations. Par ailleurs, en vertu du Traité de Sèvres de 1920, la Turquie renonçait formellement à tous ses droits et titres sur les territoires situés en dehors des frontières qui lui avaient été imparties par ce Traité. La position de l’Irak se fonde sur le statut du Koweit et du Cheikh signataire de l’Accord de 1899 avec les Britanniques: le Cheikh Mobarak Al Sabah (1869–1915), nommé parles autorités ottomanes, était sous-préfet du Koweit, lequel constituait une dépendance du Vilayet (gouvernorat) de Bassorah. Le traité de 1899 ayant été conclu à l’insu des autorités légales ottomanes, il constitue donc “un acte illégal, falsifié, internationalement inacceptable, contracté frauduleusement.” Comme l’Irak est le successeur de l’Empire Ottoman en Mésopotamie, l’État irakien a donc droit sur le Koweit, qui n’est qu’une province (sous-préfecture) de la province de Bassorah devenue irakienne. Les Koweïtiens réfutent cette argumentation en faisant valoir que l’Irak et le Koweit ont été séparés de l’Empire Ottoman par le Traité de Lausanne (1923); le Koweit était donc une ancienne possession ottomane et non une sous-préfecture de la province de Bassorah. Les frontières du Koweit et de l’Irak ayant été reconnues, cette même année, par la Grande-Bretagne en tant que Puissance Mandataire, il s’ensuit que chacun des États est tenu par les engagements frontaliers qu’a acceptés son prédécesseur. Cf. Chaoul, Melhem, “La Sécurité dans le Golfe Arabo-Persique,” Les Cahiers de la Fondation pour les Études de Défense Nationale, no 12, 4e trimestre 1978, pp. 4143 et 123–24Google Scholar; Djalili, Moham-mad-Reza, “Le Golfe Persique,” Problèmes et perspectives, Dalloz, 1978, pp. 7880 Google Scholar; Hassouna, Hussein A., The League of Arab Stales and Regional Disputes, Oceana Publications, Dobbs Ferry-New York, 1975, pp. 91140.Google Scholar

3 Conseil de Sécurité, Résolution 660, 2 août 1990.

4 Goodrich, Leland M. et Hambro, Edvard, Commentaire de la Charte des Nations Unies, éd. de la Baconnière, Neuchatel, 1948, pp. 247–48.Google Scholar

5 Article 43 de la Charte des NU.

6 Article 45 de la Charte des NU.

7 Ibid.

8 Artide 47 de la Charte des NU.

9 Ibid.

10 Goodrich, Leland M. et Simons, Anne P., The United Nations and the Maintenance of International Peace and Security, Brookings Institution, 1955, Greenwood Press, 1974, pp. 398405.Google Scholar

11 Jacques, Ballaloud, L’ONU et les opérations de maintien de la paix, éd. Pedone, , Paris, 1971, p. 76.Google Scholar

12 Ibid., p. 76.

13 Voir Manin, Philippe, L’organisation des Nations Unies et le maintien de la paix: le respect du consentement de l’État, L.G.D.J., Paris, 1971.Google Scholar

14 Ballaloud, op. cit. supra, à la p. 76.

15 Manin, op. cit. supra, à la p. 17.

16 Seyersted, Finn, “United Nations Forces: Some Legal Problems,” British Yearbook of International Law, vol. 37, 1961, pp. 439–40Google Scholar; Higgins, Rosalyn, United Nations Peacekeeping, 1946–1967, vol. 2, Asia, Oxford University Press, 1970, pp. 176–77.Google Scholar

17 Les parties à la Declaration des Quatre Nations étaient les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Union Soviétique et la Chine. L’article 5 de ladite Déclaration stipulait: “Afin d’assurer la paix et la sécurité internationales en attendant le rétablissement de l’ordre et du droit, ainsi que l’inauguration d’un système de sécurité générale, ils [les signataires] se consulteront entre eux et, quand il sera nécessaire, avec les autres membres des Nations Unies, en vue d’une action commune à exercer au nom de la communauté des nations,” in Goodrich et Hambro, op. cit. supra, à la p. 401.

18 Ibid., 399; cf. également dans le même sens: Ciobanu, Dan, “The Power of the Security Council to Organize Peace-Keeping Operations,” in Cassese, Antonio, United Nations Peace-Keeping, Sijthoff & Noordhoff, 1978, note 22, pp. 4344,Google Scholar l’auteur souligne au passage (p. 44) qu’on peut s’interroger par ailleurs, au terme de quelques décades, sur la désuétude de cette disposition transitoire que constituait, au départ, l’article 106 dont le seul intérêt est de démontrer la connexité étroite de l’article 42 avec l’article 43.

19 Rosalyn Higgins, op. cit. supra, à la p. 177.

20 Bindschedler, Rudolf, La délimitation des compétences des Nations Unies , R.C.A.D.I., 1964, I, vol. 108, pp. 367–68Google Scholar; l’auteur écrit: “La question se pose de savoir si le Conseil de Sécurité est habilité à entreprendre des actions militaires au moyen d’autres forces que celles prévues à l’Article 43. Si l’on considère les buts des Nations Unies et l’importance particulière que revêt le maintien de la paix et de la sécurité—que l’Article 1 place au premier rang des buts des Nations Unies—cette question doit être tranchée par l’affirmative. En tout cas, l’Article 42 n’interdit pas une telle action. Cependant, les Etats ne sont pas tenus, en dehors de l’Article 43, de mettre à la disposition des Nations Unies des forces armées et de leur accorder le droit de passage. Une obligation de ce genre n’existe que dans les limites tracées par l’article 43. Des actions militaires entreprises avec d’autres forces que celles prévues par cette disposition ne peuvent dès lors être entreprises qu’avec le consentement des intéressés.”

21 C.I.J., Recueil 1962, p. 167

22 Dans sa Résolution (143), du 14 juillet i960, le Conseil de Sécurité évoque explicitement “La demande d’assistance militaire adressée au Secrétaire par le Président et le Premier Ministre de la République du Congo” et “décide d’autoriser le Secrétaire Général à prendre, en consultation avec le Gouvernement de la République du Congo, les mesures nécessaires en vue de fournir à ce gouvernement l’assistance militaire dont il a besoin....”

23 Il faut souligner que le droit de légitime défense, consacré à l’article 51, demeure un recours légal pour les États, agissant individuellement ou collectivement, seulement jusqu’au moment où le Conseil de Sécurité prend les mesures nécessaires au rétablissement et au maintien de la paix; l’article 51 ne peut donc être invoqué, a posteriori, pour conférer un fondement légal à l’erreur commise dans la résolution 678. Par ailleurs, l’article 53 relatif à une action coercitive en vertu d’accords ou d’organismes régionaux et qui exige, pour une telle forme d’intervention, l’autorisation du Conseil de Sécurité, ne peut non plus servir à conférer une couverture légale à “l’autorisation” contenue dans la résolution 678 car non seulement il s’agit là du Chapitre VIII, mais surtout la Coalition armée ne saurait être qualifiée d’accord ou organisme régional au sens dudit Chapitre VIII.

24 Manin, op. cit. supra, aux pp. 22–23, considère que le Conseil de Sécurité “conserve l’intégralité des prérogatives contenues dans l’article 42” en dépit de la non-conclusion des accords prévus à l’article 43. Toutefois, l’auteur précise bien que la notion “d’urgence,” mise en avant par la C.I.J. et sur laquelle lui-même se base pour déduire qu’une éventuelle dérogation à l’article 43 en tant que procédure pourrait être admise, ne préserve le caractère opérationnel de l’article 42 que dans la mesure où une telle dérogation “ne provoquerait pas une irrégularité substantielle” (souligné par l’auteur). Selon P. Manin, “le principe fondamental posé par l’article 43, est que toute force des Nations Unies doit être constituée à partir d’accords spéciaux. C’est d’ailleurs bien selon cette règle qu’ont été constituées des forces telles que la FUNU et l’ONUC et il est permis de penser que c’est selon le même processus que pourrait être constituée une force de coercition avec des contingents venus d’États, acceptant, en pleine connaissance de cause, de les fournir en vue d’une action militaire.” Il va de soi que s’il s’agit d’appliquer sous une telle forme ad hoc, l’article 42 (combiné à l’article 43 sur la base du cas par cas), c’est seulement dans l’hypothèse où le Conseil de Sécurité entreprend lui-même l’action de coercition armée.

25 Même la position britannique, à l’occasion de la Crise de Corée, selon laquelle le Conseil de Sécurité pourrait seulement agir au titre de l’article 39 de la Charte l’habilitant à recommander des mesures, néglige, en fait, que, selon cette même disposition, les mesures dont il s’agit sont celles prévues aux articles 41 et 42. Cf. Higgins, op. cit. supra, à la p. 177; c’est pourquoi même une référence à l’article 39 fut soigneusement omise, ce qui a permis d’éviter toute controverse sur cette question.

26 Manin, op. cit. supra, à la p. 24; Ballaloud, op. cit. supra, à la p. 76.

27 Ballaloud, op. cit. supra, à la p. 120; l’auteur écrit: “Les forces armées prévues par la Charte devaient être mises au service de la sécurité collective; elles avaient pour tâche de réprimer l’agression et de porter secours à tout État victime. Elles étaient ‘combattantes.’ Les forces de maintien de la paix ne sont pas combattantes. Elles s’efforcent de maintenir la paix moins par leurs vertus militaires, que par leur seule présence.”

28 Sur le non-recours à la force des forces de maintien de la paix, cf. Ballaloud, op. cit. supra, aux 141–49; sur la systématisation des opérations de maintien de la paix, cf. Virally, Michel, L’Organisation Mondiale, éd. Colin, Armand, Paris, 1972, pp. 486–92,Google Scholar qui met en évidence quatre caractéristiques relatives à ce mode de préservation de la paix et de la sécurité internationales: ce sont des opérations consensuelles, non coercitives, conservatoires, menées par l’Organisation des Nations Unies.

29 Bien que cela n’entre pas directement dans notre propos, il convient de s’interroger sur le déploiement de forces navales destinées à assurer le respect le plus strict possible de l’embargo décrété car les moyens militaires ainsi mis en oeuvre se classent plus dans la catégorie des démonstrations et mesures de blocus prévues à l’article 42 de la Charte.

30 Les interrogations ainsi soulevées sont d’autant plus graves que le Conseil de Sécurité n’exerce aucun contrôle sur les opérations armées et que les États se trouvent de ce fait être les seuls juges de ce qui représente des “moyens nécessaires.” D’où les risques sérieux de glissements des objectifs procédant des résolutions du Conseil de Sécurité vers ceux que sont susceptibles d’assigner les États à leurs opérations militaires dans le cadre de leurs politiques nationales, comme d’une interprétation unilatérale et extensive du “mandat” découlant des résolutions pertinentes. Qui plus est, dans l’hypothèse de l’acceptation, à un moment donné, par l’Irak de se conformer à l’exigence d’un retrait inconditionnel de ses troupes du Koweit, les États agissant militairement doivent-ils suspendre immédiatement leurs opérations armées ou peuvent-ils les poursuivre en fonction de quelque autre considération et cela même si le consensus entre les Membres Permanents du Conseil de Sécurité, en particulier entre l’URSS et les Puissances Occidentales, venait à être rompu du fait que l’Union Soviétique estimerait que l’action telle que menée outrepasserait les limites dudit “mandat“? Qu’adviendrait-il, alors, dans le cas d’un nouveau blocage au sein du Conseil de Sécurité? On voit les conséquences négatives sur l’Organisation que sont susceptibles d’avoir la procédure et les modalités inédites par lesquelles l’opération armée a été déclenchée.

31 Ballaloud, op. cit. supra, à la p. 76; l’auteur ajoute: “Aucun exemple, il est vrai, ne peut être fourni, puisqu’aucune intervention des Nations Unies n’a été engagée sur cette base.”

32 Conseil de Sécurité, Résolution (82) du 25 juin 1950.

33 Conseil de Sécurité, Résolution (83) du 27 juin 1950.

34 Ballaloud, op. cit. supra, à la p. 76; en réalité, la controverse juridico-politique fut complexe et acharnée à l’Assemblée Générale qui, du fait du blocage du Conseil de Sécurité par le retour du représentant soviétique et à la faveur de la Résolution “Union pour le maintien de la paix,” se trouvait désormais saisie de l’affaire coréenne; sur l’ensemble de ce débat, il convient de se référer à l’ouvrage de Frankestein, Marc, L’Organisation des Nations Unies devant le Conflit Coréen, Pédone, 1952, pp. 119 Google Scholar s; l’auteur est fort critique à l’égard de la résolution du 7 octobre 1950 par laquelle l’Assemblée Générale a implicitement permis une extension des opérations militaires (pp. 133–35).

35 Goodrich, Leland M., “Korea: A Study of U.S. Policy in the United Nations,” Council on Foreign Relations, 1956, Kraus Reprint Co., New York, 1972, p. 142.Google Scholar

36 Ibid., 196–97.

37 Ibid., 142.

38 Ibid., 143.

39 Frankestein, op. cit. supra, à la p. 127.

40 Paragraphe 1 de la résolution 665.

41 Paragraphe 4 de la résolution 665.

42 Même si dans l’opération conduite en Corée le Gouvernement américain a conservé, en tant que Commandement Unifié, une grande marge de décision politique, il n’empêche que les consultations avec les Nations Unies et certains membres participant à la Force ont été fréquentes, ce qui a permis à l’Organisation de faire nombre de recommandations. Cf. Higgins, op. cit. supra, aux pp. 178–79.

43 Ibid., 179.

44 Goodrich, “Korea…,” op. cit. supra, à la p. 120.

45 Higgins, op. cit. supra, à la p. 178.

46 Ibid., 179.

47 Virally, op. cit. supra, à la p. 474; l’auteur estime que “l’habillage juridique a probablement servi la paix.… Cette fiction a ainsi contribué à préserver son caractère de conflit ’local’ à un affrontement où l’un des deux super-grands était indirectement engagé et l’autre directement.”

48 Ibid., 486–89.

49 Rappelons que la Force Multinationale mise en place au Liban, en 1982, à la suite de l’opération israélienne contre l’OLP, était également organisée selon un commandement multiple; toutefois, il ne s’agissait pas d’une opération de l’ONU, mais d’une intervention sollicitée par le Gouvernement Libanais auprès des États participants, et cela sur une base consensuelle impliquant notamment une coordination de l’action entre les commandements militaires de chacun des contingents nationaux et un Comité de l’Armée Libanaise constitué à cet effet par les autorités du pays; en outre, la Force n’avait aucune fonction coercitive. Cf. Boustany, Katia, Guerre civile et maintien de la paix: le cas du Liban, thèse, Paris 1, 1988, pp. 626–40.Google Scholar

50 Il existe un précédent du même ordre qui concerne la Force Multinationale de Maintien de la paix au Liban; cf. Boustany, op. cit. supra, aux pp. 785–89.

51 C’est l’opinion développée par Manin, op. cit. supra, aux pp. 20–23, qui écrit notamment: “le souci qui paraît être à la base de l’article 43—celui du respect de la souveraineté des États ‘fournisseurs’—serait respecté et plus encore même dans le cas d’accords ‘ad hoc’ que dans le cas des accords de l’article 43, puisque lesdits États accorderaient leur concours cas par cas.”

52 Virally, op. cit. supra, à la p. 489.

53 Ibid., 489.