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La reconnaissance du pilier culturel du développement durable: vers un nouveau mode de diffusion des valeurs culturelles au sein de l’ordre juridique mondial

Published online by Cambridge University Press:  09 March 2016

Véronique Guèvremont*
Affiliation:
Faculté de droit, Université Laval
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Sommaire

Par l’article 13 de la Convention de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, les parties se sont engagées à intégrer la culture dans leurs politiques de développement en vue de créer des conditions propices au développement durable. Si cette disposition marque une étape importante dans l’évolution du droit international de la culture et dans l’affinement de la notion de développement durable, ses effets juridiques sont toutefois susceptibles de se manifester à l’extérieur du champ d’application de la Convention. En effet, l’article 13 pourrait stimuler la prise en compte des valeurs culturelles dans l’interprétation des règles qui incorporent la notion de développement durable et faciliter une articulation harmonieuse — voire une synergie — entre des régimes juridiques distincts. Dans cette perspective, la référence à l’objectif de développement durable inscrite dans le préambule de l’Accord instituant l’Organisation mondiale du commerce semble par exemple offrir une avenue pour atténuer les tensions entre la poursuite des objectifs commerciaux et la prise en compte des preoccupations culturelles. De même, la mention du développement durable dans les normes climatiques peut favoriser une prise en compte des problématiques culturelles dans l’élaboration des stratégies d’adaptation. Comme le suggèrent ces exemples, le lien qui unit désormais la culture au développement durable pourrait donc exercer une influence tangible sur l’évolution de l’ordre juridique mondial.

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References

1 Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, 20 octobre 2005, 2440 RTNU 364 (entrée en vigueur: 18 mars 2007) [Convention de 2005].

2 L’articulation de la Convention avec d’autres instruments juridiques internationaux est d’ailleurs l’une des questions ayant suscité le plus de débats au cours des négociations qui se sont déroulées de 2003 à 2005 (voir sur ce point Ivan Bernier, “Les négociations de la Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles” (2005) 43 ACDI 3). Les préoccupations en matière d’articulation concernent principalement la relation entre la Convention de 2005 et les accords de l’OMC. Voir notamment Mira Burri, “The Protection and Promotion of Cultural Diversity at the International Level,” NCCR Trade Regulation Working Paper no 2009/10; Michael Hahn, “A Clash of Cultures? The UNESCO Diversity Convention and International Trade Law” (2006) 9:3 J Int’l Econ L 515; Antonios Vlassis, “La mise en œuvre de la Convention sur la diversité des expressions culturelles: Portée et enjeux de l’interface entre commerce et culture” (2011) 42:4 Études internationales 493; Tania Voon, “UNESCO and the WTO: A Clash of Cultures?” (2006) 55:3 ICLQ 635.

3 La Convention de 2005 a été adoptée par 148 États. Deux États ont voté contre son adoption: les États-Unis et Israël. Quatre États se sont abstenus: Australie, Nicaragua, Honduras, et Libéria. Au 20 janvier 2013, elle avait été ratifiée par 125 États et par l’Union européenne.

4 Voir en ce sens Cités et Gouvernements Locaux Unis, La culture: quatrième pilier du développement durable, 17 novembre 2010; Commonwealth Secretariat, Culture as the Fourth Pillar of Sustainable Development par Keith Nurse (Londres, juin 2006); Cultural Development Network, The Fourth Pillar of Sustainability: Culture’s Essential Role in Public Planning par Jon Hawkes (Melbourne: Common Ground, 2001); Assemblée Parlementaire de la Francophonie, La culture comme outil de développement durable, Réunion de la Commission de l’éducation, de la communication et des affaires culturelles, Québec, janvier 2011, aux pp 2-3. L’UNESCO n’a pas encore adhéré à cette conception. Ainsi, dans un rapport publié en 2010, elle tirait les conclusions suivantes du Sommet mondial pour le développement durable de Johannesburg: “[le Sommet] a vu dans la diversité culturelle un important facteur transversal du développement durable. Il a estimé que la diversité culturelle devait être considérée comme une dimension omniprésente (et non comme un quatrième pilier, distinct, de la durabilité), ayant un rôle important à jouer dans tous les projets de développement.” Voir UNESCO, Rapport mondial de l’UNESCO: Investir dans la diversité culturelle et le dialogue interculturel (Paris: UNESCO, 2010) à la p 201.

5 Encore faut-il préciser que ces divers qualificatifs ne semblent pas emporter de réelle conséquence, tant sur le plan conceptuel que juridique: d’une part, le pilier est par définition une composante transversale et fondamentale du développement durable et d’autre part, les notions de pilier, de dimension et de composante n’ont jamais été formellement consacrées dans un instrument juridique contraignant.

6 Déclaration des principes de la coopération culturelle internationale, 4 novembre 1966, Doc UNESCO Rés 14C/8. À l’article premier, les États y affirment que “chaque culture a une dignité et une valeur qui doivent être respectées et préservées” et que “chaque peuple a le droit et le devoir de développer sa culture.” À l’article II, ils déclarent que “[l]es nations s’efforceront de poursuivre le développement parallèle et, autant que possible, simultané de la culture dans ses divers domaines, afin que s’établisse un harmonieux équilibre entre le progrès technique et l’élévation intellectuelle et morale de l’humanité.”

7 Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel, 16 novembre 1972, 1037 RTNU 174 (entrée en vigueur: 17 décembre 1975) [Convention de 1972].

8 Tel est le cas des six conventions consacrées à la culture que chapeaute l’UNESCO (ce qui exclut les instruments relatifs au droit d’auteur). Outre les Conventions de 1972 et de 2005 précitées, il s’agit des instruments suivants: Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, 14 mai 1954, 249 RTNU 217 (entrée en vigueur: 7 août 1956); Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, 14 novembre 1970, 823 RTNU 254 (entrée en vigueur: 24 avril 1972); Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, 17 octobre 2003, 2368 RTNU 49 (entrée en vigueur: 20 avril 2006) [Convention de 2003]; Convention sur le patrimoine culturel subaquatique, 2 novembre 2001, 2562 RTNU 72 (entré en vigueur: 2 janvier 2009).

9 Le rapport du Directeur général de l’UNESCO pour la période 1975-76 associe ainsi “l’épanouissement culturel au développement et au bien-être d’un pays tout entier.” Voir UNESCO, L’UNESCO et la question de la diversité culturelle: Bilan et stratégies, 1946-2004 par Katérina Stenou (Paris: Division des politiques culturelles et du dialogue interculturel, 2004) à la p 11. C’est dans cette perspective que, dès la fin des années 60, l’UNESCO initie plusieurs projets afin de sensibiliser les États au lien fondamental unissant la culture aux processus de développement (ibid aux pp 11-14).

10 Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles, 6 août 1982 dans Conférence mondiale sur les politiques culturelles. Mexico, 26 juillet-6 août 1982. Rapport final, Doc CLT/MD/1 (1982) aux pp 39-44, au principe 10.

11 Ibid au principe 16.

12 Proclamation de la Décennie mondiale du développement culturel, Rés no 41/187 (8 décembre 1986).

13 Commission mondiale sur l’environnement et le développement, Notre avenir à tous (Montréal, Éditions du Fleuve, 1989) [Rapport Brundtland]. Selon cette définition: “[l]e développement [durable] est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs” (à la p 51).

14 Bien que le concept de développement durable émerge dans les années 80, les trois piliers tarderont à être clairement identifiés. Ainsi, alors que la Déclaration de Rio de 1992 incorpore une série de principes qui représentent la “substance du développement durable,” elle ne traite essentiellement que de deux dimensions, “le développement économique d’une part et la protection de l’environnement d’autre part, dont il faut assurer l’intégration du fait de leur interdépendance. Le pan développement social est l’époque entièrement ignoré.” Ce n’est que cinq ans plus tard, à l’occasion du sommet Rio +5, que la dimension sociale sera formellement intégrée au développement durable. Voir Virginie Barral, Le développement durable en droit international: essai sur les incidences juridiques d’un concept évolutif, Thèse de doctorat (Florence: Institut universitaire européen, 2007) aux pp 80-81, référant notamment au Programme relatif à la poursuite de la mise en œuvre d’Action 21, Doc A/S-19/29 (27 juin 1997), Partie III, à la p 11 au para 23. La Déclaration de Johannesburg s’inscrira ensuite dans le droit fil de cette évolution par une mention explicite aux trois piliers: “le développement économique, le développement social et la protection de l’environnement, piliers interdépendants et complémentaires du développement durable.” Voir Plan d’application du Sommet mondial pour le développement durable dans Rapport du Sommet mondial pour le développement durable. Johannesburg (Afrique du Sud), 26 août-4 septembre 2002, Doc NU A/CONF.199/20 (2002), Rés 2, Annexe, à la p 6 au para 5. Le document final adopté à l’issu du Sommet Rio +20 évoquera les “aspects économique, sociaux et environnementaux du développement durable” et “l’intégration des trois dimensions du développement durable” [nos italiques] (L’avenir que nous voulons, 19 juin 2012 dans Rio+20 Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio de Janeiro, 20-22 juin 2012), Résultats de la Conférence, Doc NU A/CONF. 216/L.1 (2012) aux para 3, 20.

15 Seule une phrase du rapport Brundtland semble établir un lien entre la culture et le développement durable: “[l]a notion de besoins est certes socialement et culturellement déterminée; pour assurer un développement durable, il faut toutefois promouvoir des valeurs qui faciliteront un type de consommation dans les limites du possible écologique et auquel chacun peut raisonnablement prétendre” [nos italiques]. Rapport Brundtland, supra note 13 à la p 52.

16 À titre illustratif, le rapport souligne que “les problèmes écologiques et économiques sont liés à de nombreux facteurs sociaux et politiques. Un exemple: la rapidité de la croissance démographique, qui a un impact tellement profond sur l’environnement et le développement dans beaucoup de régions, est partiellement due à des facteurs tels la condition des femmes et d’autres valeurs culturettelles” [nos italiques] (ibid à la p 45).

17 Pierre-Marie Dupuy, “Où en est le droit international de l’environnement à la fin du siècle?” (1997) 101 RGDIP 873 à la p 886.

18 Adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies: Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement, Rés AG 41/128, Doc off AG NU, 41e sess (4 décembre 1986). Voir le deuxième paragraphe de cette déclaration: “[c]onsciente que le développement est un processus global, économique, social, culturel et politique, qui vise à améliorer sans cesse le bien-être de l’ensemble de la population et de tous les individus, sur la base de leur participation active, libre et significative au développement et au partage équitable des bienfaits qui en découlent.”

19 Développement culturel, Rés AG 52/197, Doc off AG NU, 52e sess, point 97, i (18 décembre 1997) au para 2 (c).

20 UNESCO, Notre diversité créatrice: Rapport de la Commission mondiale de la culture et du développement (Paris: UNESCO, 1996).

21 UNESCO, Conférence intergouvernementale sur les politiques culturelles pour le développement (Stockholm, Suède, 30 mars-2 avril 1998): Rapport final (Stockholm: UNESCO, 1998). Le Plan d’action définit une série d’objectifs dont le premier consiste à “[c]oncevoir et établir des politiques culturelles ou revoir les politiques culturelles existantes de manière à ce qu’elles constituent un élément clé du développement endogène et durable” et encourage les États à faire des politiques culturelles “un élément clé du développement endogène et durable.” L’Objectif 8 recommande aux États de “[p]romouvoir des activités visant à sensibiliser les populations et les organismes de décision à l’importance de la prise en compte des facteurs culturels dans le processus de développement durable.”

22 Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle, 2 novembre 2001, Doc UNESCO 31 C/Rés 25 dans Actes de la Conférence générale 31e sess. Paris, 15 octobre-novembre 2001, vol 1 “Résolutions” (Paris: UNESCO, 2002) à la p 73, art 11.

23 Convention de 2003, supra note 8, préambule, au para 3.

24 Ibid, art 2.

25 Cette définition suppose en effet la coexistence de deux types de patrimoine culturel immatériel: dans une première catégorie, un patrimoine culturel immatériel conforme à l’exigence d’un développement durable; dans une seconde, un patrimoine culturel immatériel non conforme à l’exigence d’un développement durable. Cette distinction exige alors l’identification de critères permettant de juger de la compatibilité d’un élément du patrimoine culturel immatériel avec le concept de développement durable. Le texte de la Convention, de même que ses directives opérationnelles, demeure toutefois lacunaire sur ce point. Voir notamment sur cette question Kurin, Richard, “Safeguarding Intangible Cultural Heritage in the 2003 Convention: A Critical Appraisal” (2004) 56:1-2 Museum International 66 aux pp 7071.Google Scholar

26 Comité intergouvernemental pour la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, Projet de directives opérationnelles pour l’intégration de la culture dans le développement durable (article 13 de la Convention), Doc CE/08/2.IGC/5 (25 septembre 2008) au para 2.

27 Convention de 2005, supra note 1, art 13, qui se lit comme suit “[l]es Parties s’emploient à intégrer la culture dans leurs politiques de développement, à tous les niveaux, en vue de créer des conditions propices au développement durable et, dans ce cadre, de favoriser les aspects liés à la protection et à la promotion de la diversité des expressions culturelles.”

28 UNESCO, Article 13 de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Directives opérationnelles. Intégration de la culture dans le développement durable, Conférence des Parties, 2e sess (Paris, juin 2009) au para 2.

29 Ibid au para 5.

30 Ibid au para 6.

31 Le concept de développement durable “se caractérise ainsi par sa variabilité et son adaptabilité dans le temps, dans l’espace, en fonction des sujets et du domaine auxquels il s’applique. Le développement durable est donc un concept évolutif ratione temporis, loci, personae et materiae. La souplesse de sa formulation et l’indétermination relative de ses conséquences juridiques se révèlent des qualités essentielles du concept et de surcroît nécessaires à son adaptabilité. Ainsi, la généralité et le haut degré d’abstraction dans la formulation de la norme de développement durable soulignent que l’on est en présence d’un principe quidemande à être concrétisé au cas par cas et non pas d’une règle aux implications juridiques précises et déterminées.” Voir Barral, supra note 14 à la p 242.

32 Déjà, certains auteurs se positionnent en ce sens “[l]a culture est perçue, notamment depuis le Sommet mondial du développement durable de 2002, et l’adoption en 2005 de la Convention internationale sur la diversité culturelle, comme aussi importante que les trois autres composantes traditionnelles (social, économique, environnementale) du développement durable.” Voir Chantal Cans, “Environnement et développement durable” dans Yves Petit, dir, Droit et politiques de l’environnement (Paris: La Documentation française, 2009) 7 à la p 12.

33 Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles, supra note 10 au para 6.

34 Koskenniemi, Martti, “Le droit international et la voie de l’éducation juridique: entre ‘constitutionnalisme’ et ‘gestionnariat’” (2007) 1:1 EJLS 1 à la p 2.Google Scholar

35 Ibid.

36 “Chaque régime s’accompagne de ses propres principes, de son propre savoir-faire et de sa propre ‘éthique’, laquelle ne s’apparente pas forcément à celle des spécialisations voisines.” Voir Groupe d’étude de la Commission du droit international, La fragmentation du droit international: difficultés découlant de la diversification et de l’expansion du droit international par Martti Koskenniemi, 58e sess, A/CN.4/L.682 (13 avril 2006) à la p 15 [Rapport de la CDI sur la fragmentation].

37 Ibid à la p 5.

38 Le mécanisme de règlement des différends de l’OMC est souvent cité en exemple. En raison de son efficacité et de son caractère exclusif, il exerce indéniablement un pouvoir d’attraction sur des différends fondés à la fois sur des considérations commerciales et d’autres natures. La compétence des juges à trancher des litiges où s’opposeraient des intérêts commerciaux et non commerciaux suscite toutefois de nombreux débats. Voir notamment sur ce point Pauwelyn, Joost, Conflict of Norms in Public International Law: How WTO Law Relates to Other Rules of International Law (Cambridge: Cambridge University Press, 2003) à la p 23.CrossRefGoogle Scholar

39 Il s’agit de l’organe chargé d’examiner les différends soumis par les Membres de l’OMC concernant les droits et les obligations découlant des accords chapeautés par cette Organisation.

40 En effet, l’enclenchement du mécanisme de règlement des différends de l’OMC se fait à la demande d’une seule des parties au litige.

41 Convention de 2005, supra note 1, art 25.

42 En vertu de l’article 3:2 du Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, “[l]es recommandations et les décisions de l’ORD ne peuvent pas accroître ou diminuer les droits et obligations énoncés dans les accords visés.” L’article 3:4 ajoute qu’“[e]n formulant ses recommandations ou en statuant sur la question, l’ORD visera à la régler de manière satisfaisante conformément aux droits et obligations résultant du présent mémorandum d’accord et des accords visés.” Le Mémorandum d’accord édicte donc qu’en aucun cas des règles issues d’accords conclus à l’extérieur du cadre de l’OMC ne sauraient être appliquées par l’ORD, prévenant ainsi toute modification formelle, par l’organe juridictionnel, de l’équilibre atteint au sein du système commercial multilatéral. Trachtman, Joel P, “The Domain of the WTO Dispute Resolution”; (1999) 40:2 Harv Int’l LJ 333 à la p 342.Google Scholar

43 Sur la question de l’exception culturelle, voir notamment Atkinson, Dave, “De l’ ‘exception culturelle’ à la ‘diversité culturelle’: les relations internationales au cœur d’une bataille planétaire” (2000) 1 AFDI 938 et (2001) 2 AFDI 663;Google Scholar Bernier, Ivan, “Commerce international et cultures nationales: le débat sur la clause d’exception culturelle dans les négociations de l’Uruguay Round” dans Beaulac, Mario et Colbert, François, dir, Industries culturelles nationales et mondialisation des marchés. Actes du Colloque tenu à Montréal du 21 au 23 octobre 1993 (Montréal: École des Hautes Études Commerciales, 1994) 45 aux pp 6061;Google Scholar des Roziers, Laurence Burin, Du cinéma au multimédia. Une brève histoire de l’exception culturelle, Les notes de l’ifri, n° 5 (Paris: IFRI, 1998);Google Scholar Mallet-Poujol, Nathalie, “Exception culturelle et audiovisuel: le regard d’unjuriste” dans Mezghani, Nébila et Cornu, Marie, dir, Intérêt culturel et mondialisation, t 2, Les aspects internationaux (Paris: L’Harmattan, 2004) 245;Google Scholar Mayer-Robitaille, Laurence, Le statut juridique des biens et services culturels dans les accords commerciaux internationaux (Paris: L’Harmattan, 2008);Google Scholar Regourd, Serge, L’exception culturelle, Que sais-je? (Paris: Presses Universitaires de France, 2002);Google Scholar Richieri-Hanania, Lilian, Diversité culturelle et droit international du commerce (Paris: CERIC / La Documentation française, 2009) aux pp 2223, 104-8.Google Scholar

44 En effet, certaines règles de l’AGCS sont uniquement applicables aux services ayant fait l’objet d’engagements spécifiques. Il s’agit principalement des règles relatives à l’accès au marché et au traitement national. Concernant ces dernières, les Membres demeurent libres d’inscrire les secteurs de leur choix sur leur liste d’engagements et de fixer des conditions à respecter pour que les règles soient applicables aux services concernés. Voir les articles XVI et XVII de l’AGCS. Les autres règles de l’AGCS s’appliquent à l’ensemble des services, quels que soient les engagements contractés par chaque Membre.

45 Les services audiovisuels comprennent notamment les services de production et de distribution de films cinématographiques et bandes vidéo, les services de projection de films cinématographiques, les services de radio et de télévision, les services de diffusion radiophonique et télévisuelle, et les services d’enregistrement sonore. Les autres services culturels susceptibles d’être visés par les engagements des Membres sont notamment les services de spectacles (y compris pièces de théâtre, orchestres, et cirques), ainsi que les services des bibliothèques, archives, musées. Voir OMC, Classification sectorielle des services, OMC Doc MTN.GNS/W/120 (1991).

46 Protocole de coopération culturelle annexé à l’accord de Partenariat économique entre l’UE et le CARIFORUM, CARIFORUM/CE/PIII/DC/fr 1 (19 décembre 2007) [Protocole de coopération culturelle].

47 Ibid, préambule, au para 3.

48 Ibid, art 1:1.

49 L’article 1:1 précise en effet que le Protocole ne porte pas “préjudice aux autres dispositions de l’accord.”

50 Protocole de coopération culturelle, supra note 46, préambule, au para 4.

51 Voir sur ce point Ernst-Ulrich Petersmann, “Justice as Conflict Resolution: Proliferation, Fragmentation, and Decentralization of Dispute Settlement in International Trade” (2006) 27:2 U Pa J Int’l Econ L 273 à la p 281.

52 Rapport de la CDI sur la fragmentation, supra note 36 à la p 25.

53 Ibid à la p 227.

54 Ibid à la p 230. À l’appui de ce raisonnement, l’auteur cite alors Daillier, P., Forteau, M., et Pellet, A. “[u]n traité ne peut être considéré isolément. Non seulement il est ancré dans les réalités sociales, mais encore ses dispositions doivent être confrontées avec d’autres normes juridiques avec lesquelles elles peuvent entrer en concurrence.” Voir Dinh, Nguyen Quoc, Droit international public, 8e éd par Daillier, Patrick, Forteau, Mathias, et Pellet, Alain (Paris: LGDJ, 2009) à la p 266. L’auteur du Rapport de la CDI sur la fragmentation, supra note 36 à la page 291, ajoute que “bien qu’un tribunal puisse n’être compétent que pour un instrument donné, il doit toujours interpréter et appliquer cet instrument dans ses relations avec son milieu normatif, c’est-à-dire avec les ‘autres’ règles de droit international.”Google Scholar

55 Rapport de la CDI sur la fragmentation, supra note 36 à la p 230. Bien que le principe d’intégration systémique de l’article 31:3 c) constitue un précieux outil à la disposition des juridictions internationales, certaines modalités relatives à son application devront néanmoins être clarifiées. Cela concerne notamment les traités qui pourront être considérés par le juge, et plus spécifiquement la question des parties à ces traités. À cet égard, il ne fait aucun doute que les limitations fixées par le Groupe spécial dans l’affaire Communautés européennes – Produits biotechnologiques embarrassent les partisans du principe d’intégration systémique puisqu’il a été établi que l’article 31:3 c) devait être interprété de manière à ce que seuls les traités auxquels tous les Membres de l’OMC sont parties puissent être pris en compte (voir Communautés européennes – Produits biotechnologiques (2006), OMC Doc WT/DS291, 292, 293/R au n° 7.68 (Rapport du Groupe spécial)). Cette conclusion a fait l’objet de sérieuses critiques (voir notamment Rapport de la CDI sur la fragmentation, supra note 36 à la p 248). Selon l’auteur de ce rapport, non seulement une telle conception de l’article 31:3 c) rend “pratiquement impossible de jamais trouver un contexte multilatéral où il serait permis de faire référence à d’autres traités internationaux pour faciliter l’interprétation,” mais son résultat paraît aberrant puisque “[c]urieusement, cela aurait pour effet que plus le nombre de parties à un traité multilatéral comme les accords visés de l’OMC s’accroît, plus ces traités seraient retranchés du reste du droit international” (ibid à la p 259). Il ajoute que “[d]ans la pratique, il s’ensuivrait que les accords multilatéraux se retrouveraient isolés comme autant d’“îles’ n’autorisant aucune référence inter se dans leur application.”

56 En vertu de l’article 3:2 du Mémorandum d’accord, les dispositions des accords de l’OMC doivent être interprétées “conformément aux règles coutumières d’interprétation du droit international public.” Il a été considéré que l’expression “conformément aux règles coutumières d’interprétation du droit international public” ouvrait la porte, par le biais de l’article 31:3 de la Convention, à une application d’autres règles que celles découlant des accords de l’OMC (voir Pauwelyn, Joost, “How to Win a World Trade Organization Dispute Based on Non-World Trade Organization Law?” (2003) 37:6 J World Trade 997 à la p 1001).Google Scholar

57 Fabri, Hélène Ruiz, “Jeux dans la fragmentation: la Convention sur la promotion et la protection de la diversité des expressions culturelles” (2007) 111:1 RGDIP 43 aux pp 7980.Google Scholar Inversement, il serait envisageable qu’une commission de conciliation créée pour régler un différend fondé sur l’une des dispositions de la Convention sur la diversité des expressions culturelles considère les engagements liant les parties au différend au titre des accords de l’OMC. Rappelons que l’article 25 de la Convention de 2005, supra note 1, permet aux parties d’avoir recours à la conciliation en cas de litige sur l’interprétation ou l’application de ce texte. L’Annexe relative à la procédure de conciliation précise que la Commission de conciliation “établit sa propre procédure” et “rend une proposition de résolution du différend que les Parties examinent de bonne foi” (voir art 5 de l’Annexe).

58 Voir notamment Dubin, Laurence, “Fonction intersystémique du concept de développement durable” dans Fabri, Hélène Ruiz et Gradoni, Lorenzo, dir, La circulation des concepts juridiques: le droit international de l’environnement entre mondialisation et fragmentation, UMR de droit comparé de Paris, n° 16 (Paris: Société de Législation Comparée, 2009) 175.Google Scholar

59 C’est d’ailleurs par ce biais que la valeur environnementale est venue influencer l’interprétation de certaines dispositions des accords de l’OMC, lesquels poursuivent prioritairement des objectifs commerciaux. Voir sur ce point la partie III-A, ci-dessous.

60 Qualifié de “formule de compromis” par la CDI. Voir Rapport de la CDI sur la fragmentation, supra note 36 à la p 152, le soutien mutuel “est un principe de cohérence et de coexistence entre les instruments juridiques internationaux,” ce qui commande précisément une “lecture intégrative des divers instruments juridiques internationaux dans l’optique de la préservation de leur intégrité et de la non modification des droits et obligations y afférents et négociés au sein de fora internationaux distincts.” Voir de Chazournes, Laurence Boisson et Mbengue, Makane Moïse, “À propos du principe du soutien mutuel: Les relations entre le Protocole de Cartagena et les Accords de l’OMC” (2007) 111:4 RGDIP 829 à la p 830.Google Scholar Ce principe est d’ailleurs associé au principe d’intégration systémique “[b]oth ... imply a preference to synchronize sub-systems of international law and general international law at the level of negotiations, implementation, recognition, interpretation, and application.” Voir Van Damme, Isabelle, ““Systemic Integration” of International Law: Views from the ILC, the WTO CTE, and UNESCO” dans McManus, John, dir, Fragmentation: la diversification et l’expansion du droit international. Travaux du 34e Congrès annuel du Conseil canadien de droit international tenus à Ottawa du 26 au 28 octobre 2005 (Ottawa: Conseil canadien de droit international, 2006) 59 aux pp 5960.Google Scholar

61 En effet, “si ce principe [de soutien mutuel] a vocation à s’appliquer dans le cadre des relations normatives inter-et intra-systémiques, l’attention dont il a fait l’objet a progressivement conduit les États à “dénormativiser” son champ d’application pour en faire un nouveau paradigme pour l’interprétation du développement durable. Ainsi, les piliers, et non plus seulement les normes, économique et environnemental seraient eux aussi caractérisés par un soutien mutuel.” Voir Géraud de Lassus Saint-Geniès, “Les piliers économique et environnemental du développement durable: conciliation ou soutien mutuel? L’éclairage apporté par la Cour internationale de Justice dans l’Affaire des Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c Uruguay)” (2010) 48 ACDI 151 à la p 161.

62 Ibid à la p 162.

63 Voir UNESCO, Comité intergouvernemental pour la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, Concertation et coordination internationales: état des lieux sur l’article 21 de la Convention, 5e sess, point 8, Doc UNESCO CE/11/5.IGC/213/8REV2 (18 novembre 2011) à la p 5.

64 Bernier, Selon Ivan, “cet engagement, qui en est un de bonne foi, pourrait aller jusqu’à exclure que les Parties [qui] défendent, dans d’autres enceintes internationales, des positions carrément à l’encontre des objectifs et des principes de la Convention et susceptibles de compromettre leur engagement aux termes de celle-ci.” Voir Bernier, Ivan, Les relations entre la Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles et les autres instruments internationaux: l’émergence d’un nouvel équilibre dans l’interface entre le commerce et la culture (Québec: Ministère de la Culture et des Communications, 2009) à la p 18, en ligne: Ministère de la Culture et des Communications <http://www.diversite-culturelle.qc.ca/fileadmin/documents/pdf/FR_Relations_entre_Convention_Unesco_instruments_internationaux.pdf<.Google Scholar

65 Art IV et XX f) du GATT de 1994.

66 Le paragraphe 2 du Préambule de cet accord énumère les objectifs poursuivis par ses Membres, lesquels doivent agir “conformément à l’objectif de développement durable” et “d’une manière qui soit compatible avec leurs besoins et soucis respectifs à différents niveaux de développement économique.”

67 États-Unis – Prohibition à l’importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevettes (1998), OMC Doc WT/DS58/AB/R au n° 153 (Rapport de l’Organe d’appel) [États-Unis – Crevettes]. C’est ce qui a été réitéré plus récemment par l’Organe d’appel dans son rapport Communautés européennes – Conditions d’octroi de préférences tarifaires aux pays en développement (2004) OMC Doc WT/DS246/AB/R au n° 161 (Rapport de l’Organe d’appel) : “le préambule del’ Accord sur l’OMC éclaire tous les accords visés.”

68 La mesure a néanmoins été sanctionnée par l’Organe d’appel, sa mise en œuvre ayant étéjugée non conforme aux prescriptions du chapeau de l’article XX (voir États-Unis – Crevettes, supra note 67 aux pp 59-81).

69 Bien que le préambule ne possède pas de force obligatoire, il constitue un élément d’interprétation du traité (voir Daillier, Forteau, Pellet, supra note 54 à la p 146). Rappelons que dans l’affaire entre la France et les États-Unis d’Amérique relative aux droits des ressortissants de ce dernier pays au Maroc, la Cour internationale de Justice a déclaré que pour interpréter les dispositions de l’Acte d’Algésiras de 1906, il convenait de tenir compte de ses buts, qui sont énoncés dans le préambule (Affaire relative aux droits des ressortissants des États-Unis d’Amérique au Maroc (France c États-Unis d’Amérique), Arrêt du 27 août 1952, [1952] CIJ rec 176 aux pp 196-97).

70 Les critères de similarité, développés dans lajurisprudence sur le test de similarité de l’article III du GATT, sont les utilisations finales du produit sur un marché donné; les goûts et habitudes des consommateurs, les propriétés, la nature et la qualité du produit, ainsi que le classement tarifaire des produits. Voir GATT, Report by the Working Party on Border Tax Adjustments, GATT Doc L/3464 (1970) au para 18 (uniquement disponible en anglais sur le site de l’OMC). Ces critères furent ultérieurement repris par de nombreux groupes spéciaux appelés à se prononcer sur la similarité de deux produits.

71 Canada – Certaines mesures concernant les périodiques (1997), OMC Doc WT/DS31/AB/R (Rapport de l’Organe d’appel) [Canada – Périodiques].

72 Un périodique à tirage dédoublé est un périodique dont le contenu rédactionnel (textes et photographies) est généralement le même que l’édition d’origine (dans ce cas-ci, l’édition américaine), mais dont la publicité variera en fonction du pays vers lequel le magazine est exporté (dans ce cas-ci, le Canada). Les périodiques à tirage dédoublé permettent donc, à ceux qui les produisent et les distribuent, de faire du profit sur un périodique déjà amorti sur le territoire national.

73 Une note interprétative liée à la deuxième phrase de l’article III:2 du GATT précise que le traitement national en matière de taxes et autres impositions intérieures interdit non seulement les discriminations entre produits similaires, mais également entre produits directement concurrents ou substituables.

74 Canada – Périodiques, supra note 71 à la p 29.

75 Ibid. Voir également sur ce point le raisonnement du Canada exposé dans le rapport du Groupe spécial “[l]a principale et, en pratique, la seule caractéristique distinctive d’un magazine était son contenu. Pour les produits culturels, le contenu jouait un rôle analogue à celui des propriétés physiques dans le cas d’un produit commercial ordinaire. Le contenu était ce que cherchait le lecteur — le message et non le support. L’utilisation finale d’un magazine était la transmission d’une information spécifique ... [D]ans chaque cas, la fonction du magazine et sa valeur pour le lecteur étaient inséparablement liées à son contenu spécifique et aux sujets traités. L’importance donnée par les États-Unis aux propriétés physiques conduisait inévitablement à amalgamer tous les magazines pour en faire des produits indifférenciables, ce qui était contraire au principe de l’interprétation étroite et à l’approche cas par cas. L’approche préconisée par le Canada, consistant à donner une importance décisive au contenu, ne conduisait pas à l’extrême opposé.” Canada – Périodiques (1997), OMC Doc WT/DS31/R au n° 3.68 (Rapport du Groupe spécial).

76 Commentant cette affaire, R.L. Matheny a défendu la nécessité que soient pris en compte les contenus culturels de ce type de bien et les arguments suivants ont été avancés. Voir sur ce point Matheny Richard L., “In the Wake of the Flood: ‘Like Products’ and Cultural Products after World Trade Organization’s Decision in Canada Certain Measures Concerning Periodicals” (1998-99) 147 U Pa L Rev 245 à la p 258.

77 L’Organe d’appel a rejeté les conclusions du Groupe spécial sur ce point au motif que ce dernier n’avait pas analysé les trois critères de similarité que sont les utilisations finales du produit sur un marché donné, les goûts et les habitudes des consommateurs, ainsi que les propriétés, la nature et la qualité du produit. Il a considéré que le Groupe spécial n’avait pas fondé ses constatations sur les pièces à conviction et les éléments de preuve qui lui avaient été fournis et nota “qu’en l’absence d’une analyse suffisante de [la première phrase de l’article III:2] dans le rapport du Groupe spécial, il n’est pas possible d’établir une détermination de l’existence de produits similaires.” L’Organe d’appel a par conséquent infirmé les constatations du Groupe spécial sur la question des “produits similaires,” sans toutefois reprendre cette analyse. Il a plutôt choisi d’examiner directement la compatibilité de la taxe avec la deuxième phrase de l’article III:2. Voir Canada – Périodiques, supra note 71 aux pp 24-26.

78 Ibid à la p 30. Il admit néanmoins qu’il s’agissait dans ce cas d’une “imparfaite substituabilité,” mais déclara que cela ne pouvait modifier son jugement (à la p 32). Il considéra alors que les “périodiques importés à tirage dédoublé et les périodiques nationaux à tirage non dédoublé sont des produits directement concurrents ou directement substituables dans la mesure où ils font partie du même segment du marché canadien des périodiques” (à la p 33).

79 Une réflexion émise par le Groupe spécial mérite d’être rapportée: “[a]vant de conclure, nous tenons à souligner, afin d’éviter tout malentendu concernant la portée et l’incidence des constatations qui précèdent, que le présent différend ne portait pas sur la faculté qu’ont les Membres de prendre des mesures pour protéger leur identité culturelle. La seule tâche qui a été confiée au Groupe spécial était d’examiner si le traitement accordé aux périodiques importés dans le cadre des mesures mentionnées spécifiquement dans les allégations de la partie plaignante était compatible avec les règles du GATT de 1994.” Voir Canada — Périodiques, supra note 75 au no 5.45.

80 Voir Chine – Mesures affectant les droits de commercialisation et les services de distribution pour certaines publications et certains produits de divertissement audiovisuels (2009), OMC Doc WT/DS363/R (Rapport du Groupe spécial) [Chine — Publications et produits audiovisuels].

81 Dans cette affaire, le Groupe spécial a noté “l’affirmation de la Chine selon laquelle les types de contenus qui sont prohibés au titre des mesures [visées] peuvent avoir une incidence négative sur la moralité publique en Chine.” En note de bas de page, il a ajouté qu’il notait en particulier “la référence faite par la Chine à la Déclaration de l’UNESCO sur la diversité culturelle.” Sur ce point, le Groupe spécial a observé “que la Chine ... a ... fait référence à la Déclaration à l’appui de l’affirmation générale selon laquelle l’importation de produits du type en cause en l’espèce pourrait, selon leur contenu, avoir une incidence négative sur la moralité publique en Chine.” Le Groupe spécial conclut qu’il n’avait “aucun problème à accepter cette affirmation générale.” Voir ibid aux nos 7.751-7.753, 7.757.

82 Lanfranchi, Marie-Pierre, “L’Organisation mondiale du commerce et la protection de l’environnement” dans Maljean-Dubois, Sandrine, dir, L’outil économique en droit international et européen de l’environnement (Paris: La Documentation française, 2002) aux pp 127–28Google Scholar. Selon l’auteur, le Préambule de l’Accord sur l’OMC soulève “la question de la balance le libre-échange et la protection des intérêts légitimes des États.”

83 Les effets sur la santé des personnes de la consommation de certains produits ont été jugé pertinents dans l’application du test de similarité. Voir Communautés européennes – Mesures affectant l’amiante et les produits en contenant (2001), OMC Doc WT/DS135/AB/R (Rapport de l’Organe d’appel).

84 L’Institut des statistiques de l’UNESCO (ISU) définit les biens culturels comme des “[b]iens de consommation qui véhiculent des idées, des valeurs symboliques et des modes de vie, qui informent ou distraient, contribuant à forger et à diffuser l’identité collective tout comme à influencer les pratiques culturelles.” Ces biens résultent “de la créativité individuelle ou collective.” ISU, Échanges internationaux d’une sélection de biens et services culturels 1994-2003: Définir et évaluer le flux du commerce culturel mondial (Montréal: UNESCO, 2005) aux pp 84-85. En vertu de l’article 4 de la Convention de 2005, supra note 1, les “‘[a]ctivités, biens et services culturels’ renvoie aux activités, biens et services qui, dès lors qu’ils sont considérés du point de vue de leur qualité, de leur usage ou de leur finalité spécifiques, incarnent ou transmettent des expressions culturelles, indépendamment de la valeur commerciale qu’ils peuvent avoir.” Les “‘[e]xpressions culturelles’ sont les expressions qui résultent de la créativité des individus, des groupes et des sociétés, et qui ont un contenu culturel,” lequel “renvoie au sens symbolique, à la dimension artistique et aux valeurs culturelles qui ont pour origine ou expriment des identités culturelles.”

85 Bien que distincts, ces deux sous-systèmes de l’ordre juridique mondial procèdent pourtant de la même mouvance, d’un même noyau commun, dont les origines datent précisément de la même époque. Voir sur ce point Véronique Guèvremont, “Le développement durable: ce gène méconnu du droit international de la culture” (2012) 116:4 RGDIP aux pp 485-88.

86 Pour une vision anthropologique de la question, voir Descola, Philippe, Par-delà nature et culture (Paris: Gallimard, 2005).Google Scholar Des économistes ont également établi des parallèles entre l’évolution du capital naturel et l’évolution du capital culturel (voir notamment Throsby, David, “Linking Cultural and Ecological Sustainability” (2008) 8:1 Int’l J Diversity in Organizations, Communities, & Nations 15 à la p 16.Google Scholar

87 Stockholm, 5-16 juin 1972 [Conférence de Stockholm].

88 Recommandations 98 et 99 dans Rapport de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement (Stockholm, 5-16 juin 1972), Doc NU A/CONF.48/14/Rev. 1 (1973) à la p 25.

89 Déclaration de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement, 16 juin 1972 dans Rapport de laConférence des Nations Unies sur l’environnement, ibid et (1973) 77 RGDIP 350 [Déclaration de Stockholm]. En outre, le principe 23 ouvre la porte à la prise en compte de considérations culturelle en mentionnant les “échelles de valeurs prévalant dans chaque pays.” Par ailleurs, il est intéressant de rappeler que l’allocution du Directeur général de l’UNESCO, René Maheu, devant la Conférence de Stockholm insistait précisément sur le lien d’interdépendance unissant nature et culture: “[l]ongtemps objets d’investigations et de dévotions distinctes voire rivales, voici que nature et culture apparaissent dans le même temps menacées l’une et l’autre, et avec elles l’homme lui-même qui n’existe qu’en leur conjonction.” Voir Batisse, Michel et Bolla, Gérard, “L’invention du ‘patrimoine mondial’,” dans Les Cahiers d’Histoire, n° 2 (AAFU, 2003) aux pp 41 et 42.Google Scholar

90 Par exemple, le Préambule de la Charte mondiale de la nature contient l’énoncé suivant: “[l]a civilisation a ses racines dans la nature, qui a modelé la culture humaine et influé sur toutes les œuvres artistiques et scientifiques, et c’est en vivant en harmonie avec la nature que l’homme a les meilleures possibilités de développer sa créativité, de se détendre et d’occuper ses loisirs.” Le principe 22 de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement contient également une mention: “[l]es populations et communautés autochtones et les autres collectivités locales ont un rôle vital à jouer dans la gestion de l’environnement et le développement du fait de leurs connaissances du milieu et de leurs pratiques traditionnelles. Les États devraient reconnaître leur identité, leur culture et leurs intérêts, leur accorder tout l’appui nécessaire et leur permettre de participer efficacement à la réalisation d’un développement durable.” Le Plan d’action annexé à la Déclaration de Johannesburg souligne pour sa part que “le respect de la diversité culturelle [est essentiel] pour assurer un développement durable.” Voir para 5 du Plan d’application du Sommet mondial pour le développement durable, supra note 14. Enfin, au paragraphe 16 de l’avant-projet de Déclaration Rio+20, intitulée The Future We Want (en français L’avenir que nous voulons), les États insistaient sur “l’importance de la culture pour le développement durable.” Il s’agissait de la seule référence à la culture. Cette phrase a été supprimée dans le texte de la déclaration finale, laquelle contient par ailleurs sept paragraphes référant à la culture, à la diversité culturelle ou au patrimoine culturel. Voir L’avenir que nous voulons, supra note 14 aux para 30, 41, 58j), 130–31, 134, 197.

91 Convention sur la diversité biologique, 5juin 1992, 1760 RTNU 170 (entrée en vigueur: 29 décembre 1993).

92 Programme des Nations Unies pour le développement, Rapport mondial sur le développement humain 2007/2008. La lutte contre le changement climatique: un impératif de solidarité humaine dans un monde divisé (Paris: La Découverte, 2007).

93 Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, 9 mai 1992, 1771 RTNU 191 (entrée en vigueur: 21 mars 1994) [CCNUCC].

94 Protocole de Kyoto à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, 11 décembre 1997, 2303 RTNU 235 (entrée en vigueur: 16 février 2005).

95 Ces mesures sont prévues aux articles 4.1 b), e) et f) de la CCNUCC. Elles sont définies par le GIEC comme des “adjustments in ecological, social, or economic systems in response to actual or expected climatic stimuli and their effects or impacts. It refers to changes in process, practices, and structures to moderate potential damages or to benefit from opportunities associated with climate change.” GIEC, Climate Change 2001: Impacts, Adaptation and Vulnerability (Cambridge: Cambridge University Press, 2001) à la p 879.

96 L’article 3.4 de la CCNUCC énonce que “[l]es Parties ont le droit d’œuvrer pour un développement durable et doivent s’y employer.”

97 Voir sur ce point Décision 1/CP.8 “Déclaration ministérielle de Delhi sur les changements climatiques et le développement durable,” Doc FCCC/CP/2002/7/Add.1 (2003) à la p 4; Décision 1/CP.10 “Programme de travail de Buenos Aires sur les mesures d’adaptation et de riposte,” Doc FCCC/CP/2004/10/Add.1 (2005) à la p 2.

98 Véronique Guèvremont et Géraud de Lassus Saint-Geniès, “Garantir l’exercice des droits culturels dans un monde plus chaud ou le défi ‘culturel’ des mesures d’adaptation aux changements climatiques” dans Cournil, Christel et Colard-Fabregoule, Catherine, dir, Changements environnementaux globaux et Droits de l’homme (Bruxelles: Bruylant, 2012) 493 aux pp 500–5.Google Scholar

99 UNESCO, La place de la culture dans le développement durable: réflexions sur la mise en œuvre de l’article 13 par David Throsby, UNESCO Doc CE/08/Throsby/Art.13 (2008) à la p 3.