Composée de tous les Français qui, nés pendant l'Empire, atteignent leur vingtième année sous Charles X ou au début du règne de Louis-Philippe, la « Jeunesse de 1830 » occupe une place privilégiée dans notre littérature et dans notre histoire. On s'accorde à reconnaître l'importance de son rôle, la richesse et la nouveauté de ses apports. On va même jusqu'à lui attribuer le mérite « d'avoir donné au XIXe siècle sa formule principale ». On parle de ses volontés, de ses espoirs, de ses inquiétudes de sa « vivante personnalité ». On n'hésite pas à la ranger au nombre de ces « générations représentatives » qui passent pour former chacune un groupe homogène et distinct, sinon, comme on l'a dit, « une sorte d'entelechie naturelle ».

L'histoire économique et sociale des établissements européens d'outre-mer n'a été jusqu'ici l'objet que d'une très insuffisante attention. Quant à celle des fortunes coloniales, indispensable pourtant à une juste intelligence des sociétés métropolitaines elles-mêmes, elle reste presque tout entière à écrire. Sur Saint-Domingue en particulier, qui nous servira ici d'exemple, et sur les fortunes de Saint-Domingue, nos connaissances sont encore moins avancées que sur les îles demeurées françaises. En dépit des indications fournies, il y a une vingtaine d'années déjà, par Mrs Boissonnade et Pierre de Vaissière, puis, plus récemment, par Mlle Maurel et le P. Gabon, il semble que le pittoresque de la flibuste et des guerres civiles ait détourné les chercheurs de porter leurs regards vers des réalités plus profondes. Mais sans doute cette carence tient-elle aussi à l'oubli où ont été trop longtemps laissées les sources les plus précieuses peut-être dont ce genre d'étude puisse faire état.

Mrs Ed. Poncelet et Em. Fairon viennent de commencer la publication d'une Liste chronologique des actes concernant les métiers et confréries de la cité de Liège. Dans la « cité ardente, qui fut jadis le foyer le plus rayonnant de la démocratie belge, les corporations de métiers ont façonné à la fois la vie politique, économique, sociale et privée de nos aïeux ; le régime corporatif conditionne l'évolution de toutes les institutions urbaines ». Les archives liégeoises ont éprouvé des pertes très importantes, mais il reste encore un grand nombre de pièces dispersées dans des fonds divers, en particulier dans le « fonds des échevins » : c'est, en effet, « devant ces derniers que les métiers faisaient mettre leurs statuts en garde de la Loi, enregistrer les actes relatifs aux biens et portaient leurs procès ».

La Suède est entrée plus tardivement que la plupart des autres pays d'Occident dans le cercle de « l'économie internationale ». Cependant l'histoire de l'ancienne économie du pays ne manque pas de saveur ni d'originalité. Pour la première fois, nous allons pouvoir l'étudier, grâce à un ouvrage aux vues très larges de Mr E. F. Heckscher.

Disons-le tout d'abord : on ne peut guère trouver de livre d'histoire dont la lecture soit plus captivante. Et il en faut rapporter avant tout le mérite à l'auteur : son style est vif, son plan original ; par principe, il ne retient des faits que ceux-là seuls qui, du point de vue de l'économie théorique, lui semblent dignes d'être connus ; il ne se laisse pas, comme certains de ses prédécesseurs, absorber par l'intérêt particulier de chaque source.

Au livre de Mr Georges Friedmann qui porte ce titre, j'ai pris un particulier plaisir. Souple, nuancé, vivant, à égale distance de l'apologie aveugle et de la critique dénigrante — inspiré sans doute par une sympathie très active pour l'U. R. S. S. et ses réalisations, mais dicté par un grand souci de constatation objective — il a le mérite d'être l'oeuvre d'un homme qui ne s'est point borné à cueillir, au cours d'une randonnée rapide, quelques « visions » de Russie propres à donner créance — j'entends aux yeux des simples — à des conclusions à la fois livresques et théoriques sur l'U. R. S. S. Il est le fruit de plusieurs longs séjours au pays de Lénine, de contacts prolongés avec les travailleurs comme avec les intellectuels de là-bas — et, faut-il dire, de contacts fructueux, puisqu'ils étaient ceux d'un homme qui comprend et qui parle le russe.

Quoique subissant profondément l'influence du présent, la civilisation musulmane, longtemps retardée dans son développement, porte davantage encore l'empreinte du passé. La nécessité de bien connaître celui-ci a justifié jusqu'à maintenant la tendance des orientalistes à se désintéresser un peu trop des événements qui se déroulent sous nos yeux. Mais, inversement, nos hommes politiques et nos administrateurs manquent souvent des notions substantielles qui leur permettraient de mieux interpréter ou de mieux contrôler à la lueur de l'histoire les phénomènes de transformation rapide auxquels nous assistons.

Diverses études récentes nous donnent l'occasion de compléter utilement nos renseignements, soit sur des faits anciens, soit sur des faits actuels de la vie des pays qui firent partie de l'Empire ottoman. Dans la première catégorie, signalons d'abord l'ouvrage de Mr R. Tresse sur le Hadj Chami, pèlerinage officiel à La Mecque, dont l'organisation fut confiée par le califat de Stamboul à la ville de Damas, du XVIe au XXe siècle.