Article contents
De l'idéologie aristotélicienne à l'empirisme médiéval. Les sols dans l'agronomie hispano-arabe
Published online by Cambridge University Press: 25 May 2018
Extract
Aux grands défrichements du XIe siècle qui étendent l'espace colonisé en Europe tempérée, l'Andalousie répond, après l'éclatement du khalifat de Cordoue, par une réorganisation économique qui est une décentralisation et tend à stimuler la production agricole à l'échelle régionale.
Émanant des princes locaux (Tolède, Grenade, Séville, Valence...), une nouvelle politique économique se formule, politique qui passe par l'intensification des méthodes culturales. A cette fin, se dessine un puissant mouvement de recours aux textes savants du Bas Moyen Age et de l'Antiquité, destinés à prouver par ces références anciennes (mésopotamienne, grecque, indienne ou romaine) la fiabilité de méthodes médiévales présentées comme un héritage inerte. De Théophraste aux auteurs du Moyen Age s'établit une étonnante continuité de la transmission agronomique ' et sur le plan de l'histoire des mentalités d'incessantes allusions aux origines mythiques de l'agriculture.
- Type
- Histoire et Sciences
- Information
- Copyright
- Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1975
References
Notes
1. Pour le détail cf. Bolens, L., Agronomes andalous du Moyen Age, Genève, éd. Médecine et Hygiène, 1974 Google Scholar.
2. Abu-1-Khayr al Ishbilï, Kitab al-falàhah, Ms B. N. Paris, n° 4764 du Catalogue Blochet (1884-1924), f° 64 à 180. Plus Extraits trad. par A. Cherbonneau, éclaircissements par H. Pérès, Alger, 1946, sous le titre « Kitâb al-Fildha » ou le Livre de la culture, 31 p ; Ibn al'Awwàm, Kitab al-falàhah, Livre de l'agriculture, texte arabe et trad. castillane J. A. Banqueri, 2 vol., Madrid, 1802 (manuscrit complet de l'Escurial) — trad. fse par J. J. Clément-Mullet, 2 t. en 3 vol., Paris, A. Franck, 1864-1867 ; Sul taglio délia vite di Ibn al-'Awwàm, C. Crispo Moncada, texte arabe inédit (ms Leide), trad. et annotations, VIIIe Congrès des Orientalistes, Actes (2e partie) Section I (Sémitique) A, pp. 217-257 ; Ibn Bassâl, Traducciôn castellana del Tratado de Agricultura de Ibn Bassâl, par J. Ma Millas-Vallicrosa, dans Al. Andalus, vol. XIII, Madrid-Granada, 1948, pp. 356-430 ; Ibn Wafid, Traducciôn castellana del Tratado de Agricultura de Ibn Wâfld, par J. Ma Millas-Vallicrosa, dans AL. Andalus, vol. VIII, Madrid-Granada, 1943, pp. 281-332.
3. Cf. Vives, H. Vicens, Historia social y econômica de Espana y America, Barcelona, 1957 Google Scholar, vol., t. I.
4. ‘Awwàm, I, 1, pp. 23 et suiv. Bassâl, pp. 356-357 ; Wâfld, pp. 300-301.
5. Khayr, 61 v°, 1.1.
6. Notons quelques divergences qui séparent les auteurs sur ce point. Le rôle premier accordé au sol est reconnu par tous sauf par I. Bassâl (pp. 356-367) qui donne la première place à l'eau, comme le fera au xvie siècle son compatriote chrétien G. Alonso de Herrera qui avait vu les Morisques de Valence irriguer les bassins. Cf. son Libro de Agricultura, \” éd., 1513. L'éd. de 1818 donne le point de vue du xixe siècle (lib. IV, cap. m, t. III, p. 13) ; le livre I est néanmoins consacré, comme chez les Arabes et conformément au point de vue actuel, à l'étude des sols.
7. Awwâm, I, vi, p. 182.
8. Ibid.. I, p. 32.
9. Pline l'Ancien, Histoire Naturelle, livre XVII (trad. J. André), Paris, Belles Lettres, III, 27. Columelle, de Re Rustica, éd. P. Panckoucke, 1845, III, 11 (vol. 1), p. 283 (ce sont de bonnes terres surtout pour la vigne ; selon Hygin et Tremellios Scrofa) ; Florentinus, dans Geoponika, V, 1, p. 310 (c'est la meilleure terre, comme on peut le voir en Egypte).
10. Awwâm, I, 1, p. 23 («de physi;a auscultatione »).
11. Cf. André, G., Propriétés générales des sols en agriculture, Paris, éd. 1946 Google Scholar, A. Colin, p. 18 (l'argile est du silicate hydraté d'aluminium rarement pur ; seul le kaolin, blanc, l'est).
12. ‘Awwâm, I, 1, p. 23.
13. Khayr, 7220, 1. 9 et 10.
14. Exemple pour le repiquage des choux-fleurs en carreaux : « le terrain étant frais et moite, on y repique le plant », Awwâm, II, p. 162. « La bette aime aussi la terre fraîche… » (Aw. II, p. 165), etc.
15. Awwâm, I, p. 76.
16. Khayr, 72 r°, 1. 9.
17. Ibid., 1. 11-12.
18. Cf. G. André, op. cit., p. 55.
19. ‘Awwâm, I, p. 24 ; Cf. G. André, op. cit., p. 117. Les propriétés biologiques sont les meilleures entre + 5° et + 45° ; cette température représente l'optimum pour la vie des micro-organismes. 20. ‘Awwâm, I, 1, p. 40.
21. de Arb., 19, vol. m, p. 377.
22. Wafld, pp. 300-301. Col., R. R., II, 2 (vol. i, pp. 107 et suiv.
23. ‘Awwâm, I, 1, p. 23.
24. Awwâm, I, X, p. 489.
25. ‘Awwâm, I, p. 44.
26. Col., de Re Rust., II, 2, vol. î, p. 107. Cf. Palladius I, 2, p. 11 : « quant au sol il doit être fertile et bien situé ».
27. Col., ibid., II, 2, vol. 1, p. 107.
28. Pline, HN, XVII, p. 3. Paris, Belles Lettres (G.André), 1964.
29. Cf. HN, XVII, 4, 31, p. 20 ; XVII, III, 27, p. 28.
30. « Commodorum Ruralium Liber » dédié à Charles II, roi de Jérusalem et de Sicile qui régna de 1287 à 1308, oeuvre écrite entre 1304 et 1306. Cite Caton, Varron, Palladius et oublie Columelle (éd. consultée, Venise 1518, sous le titre de Agricultura vulgare).
31. Wàfld, 300-301. Col., II, 2 ; Pall., I, 5, p. 13. Selon I. Hedjadj ('Awwâm, I, p. 70) « cette expérience manque d'exactitude ».
32. Herrera, I, 15.
33. Exemple de description complexe tenant lieu d'un terme inclus dans une classification : « Parmi les espèces de terres, celles qui conviennent au chou-fleur, c'est la dure, la rouge humide, dont la couche végétale est mêlée d'un peu de sable sans que pour cela elle ait perdu de sa consistance », Awwâm, I, p. 163.
34. ‘Awwâm, I, pp. 67-82.
35. Ibid., p. 74.
36. ‘Awwàm, I, 1, pp. 42-43.
37. Holger Erdtman, « La chimie vient au secours de la classification des espèces », La Recherche, n” 8, janv. 1971, p. 32.
38. Khayr, 99 v°, 1. pp. 9 et suiv.
39. G.André, op. cit., p. 112. Phénomène mis en évidence en 1885 par M. Berthelot : la matière organique permet la fixation de l'azote gazeux.
40. ‘Awwàm, I, p. 32 : « Or, tout ce qui se décompose prend une augmentation de chaleur ; mais l'eau qui y est amenée en abondance rafraîchit la couche végétale et lui donne de l'humidité. Le froid de l'eau fait équilibre à la chaleur déterminée par la décomposition ». 4L ‘Awwàm, II, p. 167 : de même l'engrais utilisé pour la bette doit contenir des feuilles de bettes, etc.
42. Encore pratiquée en Méditerranée.
43. 'Awwâm, II, p. 168.
44. Le procédé reste entièrement valable ; l'humus ne nitrifie pas sans chaulage. L'action du calcaire est fondamentale.
45. G.André, op. cit., p. 154.
46. ‘Awwàm, I, 1, p. 48.
47. Palladius (Rutilius Taurus Aemilianus), De Aghcultura, éd. P. Panckoucke, 1843, I, 5, p. 13. Il existe une version catalane datant de 1380-1385.
48. 'Awwâm, I, 2, p. 112. Cf. Théophraste, De Causis Plantarum, Trad. Hort, New York- Londres, 1926, III, 20, 3, p. 239 : « Le mélange non seulement rend ce qui manque, mais encore renforce, quel qu'il soit ».
49. Contra Pline, XVII, 5, p. 33 : «quant à amender une terre avec une autre,… c'est une opération insensée». Cf. Col., II, 15, pp. 190-191.
50. Col., V, 9 : déchausser les oliviers improductifs et entourer la souche de chaux. Cf. E. Crivelli, L'uso agricolo dei nitrati et dei fosfati neU'antichità classica, Historia IV, 1930, p. 731. Sur les achats de chaux, cf. Ibn ‘Abdun, Traité de Hisba, trad. et publié par E. Lévi-Provençal, Séville musulmane au début du xue siècle, Paris, éd. Maisonneuve, 1947, pp. 80 et 105 (à interpréter avec prudence car la chaux était aussi employée pour le revêtement des constructions).
51. ‘Awwàm, I, 1, p. 25 ; contra Pline, XVII, III, p. 28 : les terres alluviales ne sont pas toujours bonnes, car trop lourdes. Par contre Col., III, 11, p. 283 : elles sont toujours bonnes sauf pour la vigne.
52. ‘Awwàm, I, 1, p. 52.
53. Ibid., p. 52.
54. Pline, XVII, 3, p. 29.
55. Col. II, 9, p. 143; III, 1, p. 221.
56. Pall., éd. Panckoucke 1843, I, 6, p.27 : il faudra ensemencer à la fin de l'automne « pour que son amertume disparaisse avec les pluies d'hiver ».
57. ‘Awwàm, I, 1, pp. 41-69.
58. ‘Abdun, Traité, p. 9 : « Car l'agriculture est à la base de la civilisation » et « le prince doit prescrire qu'une plus grande impulsion soit donnée à la culture du sol ».
59. J. Manquené, Étude agrologique de l'Oranie Orientale, Mostaganem, 1925.
60. ‘Awwàm, II, p. 168 (selon Sagrit).
61. ‘Awwàm, I, p. 4L
62. Ibid., p. 56.
63. Pline, XVII, III, 25, p. 28.
64. Col., de Arb., 3, 6, p. 343 : aptissima vitibus terra est arenosa, sub qua consista dulcis humor.
65. Confirmé aujourd'hui. Le sable représente un apport de carbonate de chaux pour une terre menacée de stérilité par les chlorures.
66. ‘Awwâm, I, 1, p. 38.
67. ‘Awwâm, I, p. 50. Sur l'Agriculture Nabatéenne d'I. Wahsiyya et l'état actuel de la controverse, cf. Encyclopédie de l'Islam, II, 457, et T. Fahd, « Retour à I. Wahsiyya », Arabica, XVI, 1969, pp. 83-88.
68. Pall., 1, 2, p. 11.
69. Monroe, J. T., The shu ‘ûbiyya in Al-Andalus, the risàla ofibn Garcia andfive réfutations, Berkerley, 1970, pp. 5–6 Google Scholar.
70. Lewis, A. R., Naval power and trade in the Mediterranean, A. D. 500-1000, Princeton, 1951, pp. 181–182 Google Scholar.
71. Lewis, ibid., cité par Monroe, The shu ‘ûbiyya…, p. 6.
72. M. Dembinska, « La paléobotanique, science auxiliaire de l'histoire », Annales E.S.C., sept.-oct. 1970, pp. 1471 et suiv.
- 3
- Cited by