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À Propos des Arétalogies d'Isis

Published online by Cambridge University Press:  23 August 2011

A. J. Festugière
Affiliation:
Paris, France

Extract

A l'occasion d'une arétalogie de Karpokrate, qu'il publie, M. R. Harder a été induit à reprendre le problème des arétalogies isiaques, connues, comme on sait, par cinq documents du même type. M. Harder pense que tous ces textes remontent à un original égyptien (H) traduit en grec. Un exemplaire de cette traduction, gravé à Memphis dans le temple de Ptah (M), est la source de Kymé (K), Ios (J), Salonique (S) et du texte en prose qui a servi de modèle au poème d'Andros (Ap). Un exemplaire du texte égyptien, gravé dans la fabuleuse Nysa d'Arabie, c'est dire en une ville inconnue, serait, une fois traduit, la source de Diodore (D). D'après l'inscription de Kymé, la plus complète, M. Harder reconstitue cette source commune de MD. On aurait là, pense-t-il, un écrit qui se révèle égyptien, non seulement par les idées, étrangères à l'esprit grec, mais aussi par le désordre de la composition, trait proprement égyptien. D'un mot ce document aurait été forgé par les prêtres d'Egypte pour exalter auprès des Grecs le culte d'Isis, que l'on présente surtout comme une bienfaitrice de l'humanité. La tendance serait “pro-égyptienne,” et il y aurait lieu de comparer l'ouvrage d'Hécatée d'Abdère, sorte de programme de gouvernement rédigé du point de vue de l'Egypte et adressé à Ptolémée Soter pour lui recommander d'être un Bienfaiteur, à l'exemple des dieux égyptiens (Isis et Osiris) et des pharaons.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © President and Fellows of Harvard College 1949

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References

1 Pour reprendre le terme adopté par Hiller v. Gärtringen, Syll.3 1267 (Ios). Sur la forme, cf. Ed. Norden, Agnostos Theos3, pp. 177 ss.

2 Harder, R., Karpokrates von Chalkis und die memphitische Isispropaganda, Abh. Berlin, 1943, 14Google Scholar (paru en 1944), 63 pp. (J'ai eu communication de ce texte grâce à l'obligeance de M. L. Robert). Voir aussi L. Robert, REG, LIX–LX, 1946/7, pp. 342–345.

3 Inscriptions de Kymé, Ios, Salonique, Andros + Diod. Sic., I 27. Textes réunis (sauf S) dans Peek, W., Der Isishvmnus von Andros, Berlin, 1930Google Scholar. Nouvelle édition de Kymé et Ios dans I. G. XII Suppl. (1939), pp. 98–99. M. Harder y renvoie à tort pour A: l'inscription d'Andros est simplement mentionnée p. 130 (non 98), avec renvoi à Peek.

4 M. Harder s'en prend ici, à P. Roussel, dont l'excellent article (REG XLII, 1929, pp. 137 ss.) garde tout son prix.

5 Sic Harder, p. 33.

6 Rev. Arch., Mélanges Picard (à paraître).

7 Ainsi Harder, pp. 50–51.

8 Cf. Rév. H. Trism. I, pp. 319 ss.

9 Ces chiffres renvoient à la numération en paragraphes ou versets usuelle pour les arétalogies isiaques. Pour l'hymne d'Andros, je renvoie aux vers.

10 Notons en passant que cette mention est bien étrange en ce qui regarde l'épitaphe d'Isis. Cette épitaphe aurait porté, bien lisibles, les personalia (M3–11) + la conclusion (57), tout l'entre-deux, c'est à dire, 46 versets, ayant été effacé par le temps. N'est-il pas plus raisonnable de croire à deux versions, l'une courte, l'autre longue, d'un même texte circulant? Ce phénomène se rencontre souvent dans les textes de botanique astrologique: cf. Rév. H. Trism., I, pp. 143–145 (plantes zodiacales), 147–149 (plantes planétaires type a), 155–160 (pivoine).— Il n'y a rien à tirer sur ce point de l'épitaphe d'Osiris qui ne porte pas de conclusion.

11 Pour d'autres références, cf. Rév. H. Trism., I, p. 320, n. 7.

12 τοῦ νɛωτάτου Kρόνου ne peut signifier que “le plus récent,” “venu en dernier” dans une suite de dieux. D'où vient cela? Isis est fille de Keb (ou Geb) la Terre et de Nut le Ciel, couple que, en intervertissant les rôles, les Grecs ont identifié à Kronos et Rhéa. Mais, alors que Kronos, chez les Grecs, est du nombre des plus anciens dieux, Krones-Keb, dans la tradition égyptienne relative aux dieux qui ont régné en Egypte, vient au quatrième rang, après Héphaistos (Ptah), Hélios son fils, Sôs ou Arès fils d'Hélios (cf. Joa. Antioch. [c.610–631] ap. Hopfner, Fontes, p. 730). Mais l'on voit aussitôt que l'épithète n'a d'intérêt que si l'on parle à des Grecs, pour distinguer ce Kronos dernier venu du Kronos grec qui est premier venu. Loin de prouver l'existence d'une antique source égyptienne (Harder, pp. 37–38), cette précision explicative me paraît l'indice que l'auteur quel qu'il soit (et ce peut fort bien être Diodore lui-même), avait en vue un auditoire grec.

13 Bien plus graves sont les différences entre le texte de Stobée et celui des manuscrits du Corpus Hermeticum pour les parties communes: or nul ne songe à supposer ici un original égyptien diversement traduit, cf. l'introd. de Nock au Corp. Herm., I, pp. XLI ss. Pour un exemple particulièrement frappant dans les lettres hippocratiques, cf. Pasquali, G., Storia della tradizione …, Florence, 1934. pp. 404 ssGoogle Scholar.

14 P. Roussel, l.c., pp. 143–144, n'excluait pas cette hypothèse.

15 Voir mon c.r. dans REG, LIII, 1940, pp. 237–241.

16 Influence de la philosophic sur Hécatée d'Abdère, Schwartz, Rh. Mus., XL, pp. 223 ss., en partic. 256 ss., Jacoby ap. P. W., VII, 2753 ss., 2758; sur Evhémère, Jacoby ap. P. W., VI, 957 ss.

17 L'authenticité de ce discours n'a pas été contestée (cf. G. Mathieu, éd. Budé, II, p. 92), à la différence du Nicoclès.

18 Cf. Πρὸς Nικοκλέα 15. Voir aussi 16: principes de la χρηστὴ πολιτɛία, 17: lois justes et utiles, 18: pureté de la justice, 22: culte de la vérité (τὴν ὰλήθɛιαν … φαίνου προτιμᾶν. Selon Harder, p. 27, M 29 τὸ ἀληθὲς καλὸν ἐνομοθέτησα νομίζɛσθαι ne serait pas grec), 24: ἀρχικὸς ɛἶναι βούλου μὴ χαλɛπότητι μηδὲ τῷ σφόδρα κολάζɛιν, et Evagoras 43: Justice et φιλανθρωπἰα, Philippe 114: φιλανθρωπία.

19 Cf. Schubart, W., Das hellenistische Königsideal nach Inschriften und Papyri, Arch. f. Pap., XII (1936), pp. 1Google Scholar ss.

20 Cf. Thalheim, P.W., V 2567–2568. Pour la garantie civique du lien nuptial à l'âge classique, cf. Esch. Eum. 217–8 ɛὐνὴ γὰρ ἀνδρὶ καὶ γυναικὶ μόρσιμοσ | ὅρκου ᾽στι μɛίζων τῇ δίκῃ φρουρουμένη avec la note de Thomson ad loc.

21 Cf. Thalheim, P.W., s.v. Ehescheidung, V 2011–2013.

22 Cf. Mitteis, Grundzüge, pp. 213–217.

23 Aussi bien ne faut-il pas traduire: “Ich zwang die Männer, zu ihren Frauen gut zu sein” (Harder, p. 26), ce qu'on interprète comme une contrainte légale: il ne peut s'agir du durus amor, dit M. Harder, puisqu'on a στέργɛιν, “sondem es geht um Recht und Stellung der Frau gegenüber dem Mann.” Le grec ne dit rien de tel: “J'ai fait de la tendre affection dont les femmes sont l'objet de la part de leurs maris une nécessité naturelle.” Il s'agit bien en effet de στοργή, non d' ἔρως, mais cette στοργή est le fait de la nature.

24 Cf. Arist., Eth. Nic, VIII 12, 1162 a 16 ἀνδρὶ δὲ καὶ γυναικὶ φιλία δοκɛῖ καιὰ φύσιν ὑπάρχɛιν… a 25 ɛἵη δ᾽ ἂν καὶ δι᾿ ἀρɛτήν, ɛἰ ἐπιɛικɛῖς ɛὶɛν. ἓστι γὰρ ἐκατέρον ἀρɛτἠ, καὶ χαίροιɛ ἃν τῷ τοιούτῳ.

25 Cf. Epicure et ses dieux, pp. 40–41.

26 Cf. W. W. Tarn, Hellenistic Civilisation2, pp. 89–91. Pour la protection de l'enfance et les devoirs des parents envers leurs enfants (M 20 ἐγὼ τοῖς ἀστόργως γονɛῦσι διακɛιμένοις τɛιμωρίαν ἐπέθηκα), cf. Arist., Eth. Nic, VIII 14, 1163 b 18 ss.: un fils n'a pas le droit de répudier son père, mais un père peut répudier son fils, car il est, à l'endroit de ce fils, créancier: néanmoins, selon toute probabilité, nul père ne consentirait à répudier son fils, sauf dans le cas de vice extrême (ἅμα δ᾽ ἴσως οὐδɛίς ποτ᾽ ἂν ἀποστῆναι δοκɛῖ μὴ ὑπɛρβάλλοντος μοχθηρία). Au surplus il ne faudrait pas exagérer la bonté des moeurs égyptiennes sur ce point: l'exposition des enfants existait en Egypte comme en Grèce, v. gr. P. Ox. IV 744 (Ier siècle av. J.C.) = Lietzmann, Gr. Pap. (Kl. Texte 14), 5, 11. 8 ss. ἐὰν πολλαπολλων τέκῃς, ἐὰν ἦν ἂρσɛνον, ἂφɛς, έὰν ἦν θήλɛα, ἒκβαλɛ.

27 Peut-être, dans le P. Ox. 1380, 239, faut-il compléter avec Grenfell-Hunt. σὺ στρατɛίας καὶ ἡγɛμονίας κυρία τοὺς 〈τυράννους〉ɛὐκόπως διαφθɛίρɛις πιστοῖς βουλɛύμασι. Contra, van Groningen, De pap. Oxyrh. 1380, p. 58.

28 Dans le même sens, Peek, p. 158.

29 Cf. le décret d'Erésos contre des tyrans (dernier tiers du IVe s.), Inscr. Jur. Gr., II, p. 161 ss. (= OGI 8 I et II, deux décrets d'Erythrées ordonnant la restauration de la statue d'un tyrannicide (entre 333 et 324), Syll.3 284, le décret de Priène après sa délivrance de la tyrannie de Hiéron (vers 297), I. Priène, 11, la loi d'llion contre les tyrans (IIIe s.), Inscr. Jur. Gr., II, pp. 25 ss.

30 πρῶτον μὲν γὰρ παῦσαι (sc. τὸν Ὄσιριν) τῆς ἀλληλοϕαγίας τὸ τῶν ἀνθρώπων γένος, εὑρούσης μὲν Ἵσιδος τόν τε τοῦ πυροῦ καὶ τῆς κριθῆς καρπόν…, τοῦ δὲ Ὀσἰριδος ἐπινοησαμένου καὶ τὴν τούτων κατεργασίαν τῶν καρπῶν ἡδέως μεταθέσθαι πάντας τὴν τροϕὴν διὰ … τὸ ϕαίνεσθαι συμϕέρον ὑπάρχειν ἀπέχεσθαι τῆς κατ̕ ἀλλήλων ὠμότητος.

31 La phrase de l'Epinomis, dont M. Harder se débarrasse aisément en la qualifiant de “dunkle Stelle” (p. 29), “ein schlimm verklausulierter Satz” (p. 29, fin note 2 de la p. 28).

32 Au surplus, le sujet n'est pas neuf. Cf. J. Haussleiter, Der Vegetarismus in der Antike (RG VV XXIV, 1935), ch. 8: Die Urgeschichte der Nahrung im Lichte des Vegetarismus, pp. 54 ss., et, plus anciennement, pour le passage de I'état sauvage à l'état civilisé, Graf, W.Uxkull-Gyllenband, Griech. Kulturentstehungslehren (Beil. zu Arch. f. Gesch. d. Phil., XXXVI, 1924)Google Scholar, Norden, E., Beiträge zur Gesch. d. gr. Philosophic, Jahrb. f. kl. Phil., 19, Suppl. Bd., 1893, pp. 414 ssGoogle Scholar. et déjà Preller, Philol., VII (1852), pp. 1–60. Voir aussi une note intéressante dans Zielinski, Die Märchenkomödie in Athen (= Iresione, I, pp. 71/2) qui analyse les passages de l'Ancienne Comédie se rapportant à l'âge d'or, “au temps où les bêtes parlaient” (cf. ib., pp. 12, 31–45). L'étude de Zielinski est de 1885.

33 Déjà peut-être Polyphème, qui n'est pas σιτοφάγος (Od. IX 191), mais ἀνδροφάγος (X 200).

34 A vrai dire les Grecs avaient sur ce point deux traditions. Dans l'une, les homines ont commencé par le θηριώδης βίος qui semble impliquer l'anthropophagie. Dans l'autre (l'âge d'or: voir Zielinski, cité supra n. 32), les homes ont commencé par le végétarianisme, la terre leur offrant d'elle-mêae tous ses fruits: Hés. Trav., 109–201, Empéd. fr. 128, Plat. Polit. 271 d–e, Lois 782 c 2 ss. où les deux états primitifs, celui de l'allélophagie et celui de l' Ὀρφικὸς βίος, sont opposés. Théophraste (Porph. de abst. II 27) mêle les deux traditions, son dessein étant de montrer que les hommes ont commencé par le végétarianisme et que l'usage actuel (manducation des animaux) est la survivance d'une perversion abominable (anthropophagie) dont les hommes se sont rendus coupables quand les fruits de la terre ont manqué.

35 Je laisse à dessein Protagoras, πɛρὶ τῆς ἐν ἁρχῆ καταστάɛως (Plat. Prot. 320 c 8 ss., Polit. 274 b–e et Vorsokr. II, p. 269) parce qu'on ne peut prouver en effet que Protagoras y ait mentionné l'allélophagie d'une manière explicite, cf. Harder, p. 28, n. 1.

35a C'est le cas, par exemple, d'Hippocrate, π.ἀ.ί.

36 Plus tard encore: cf. Athénion (IIIe s. av. J.C.: Kaibel, P.W., II 2041) ap. Com. Att. Fr., III 369 K., V. 4–6 τοῦ θηριώδους καὶ παρασπόνδου βίου | ἡμᾶς γὰρ ἀπολύσασα (sc. ἡ μαγɛιρικὴ τέχνη), καὶ τῆς δυσχεροῦς | ἀλληλοφαγίας, Plut. Is. Os. 13 βασιλɛύοντα δ᾽ Ὄσιριν Aίγυπτίους μὲν ɛὐθὺς ἀπόρου βίου καὶ θηριώδους ἀπαλλάζαι καρπούς τɛ δɛίζαντα καὶ νόμους θέμɛνον αὐτοῖς κτλ. (passage évidemment inspiré d'Hécatée qui attribue à Osiris la suppression de l'allélophagie). Je ne fais pas état, la date n'en étant pas certaine, de deux vers du θɛολόγος Ὀρφɛύς (Sext. Emp. Adv. Math. II 31, t. II, p. 216.5 M. = Orph. Fr., n°292 K.) ἦν χρόνος, ἡνίκα φῶτɛς ἀπ᾽ ἀλλήλων βίον ɛἶχον | σαρκοδακῆ, κρɛίσσων δὲ τὸν ἥττονα φῶτα δάïζɛν. Sur le V. 1032 des Grenouilles Ὀρφɛὺς μὲν γὰρ τɛλɛτάς θ᾽ ἡμῖν κατέδɛιζɛ φόνων τ᾽ άπέχɛσθαι et ceux d'Horace, Ars. poet. 391–392 silvestris homines sacer interpresque deorum | caedibus et uictu foedo deterruit Orpheus, cf. Linforth, , The Arts of Orpheus (Berkeley, 1941), pp. 68Google Scholar ss.: le sens “he put an end to cannibalism” n'est pas exclu.

37 Cf. Bywater, J. of Phil., VII, 1876, pp. 64–75.

38 Cf. supra, p. 1, n. 5.

39 M 50 ἐγὼ τὰ πλωτὰ ἄπλωτα ποιῶ, ὄταν ἐμοὶ δόξῃ n'est pas un miracle par lequel Isis changerait la mer en terre (Harder, p. 46, n. 3), mais “je rends la mer non navigable, quand il me plaît,” cf. la formule d'imprécation μὴ θάλασσαν πλωτὴν ɛἶναι, Syll.3 1238.7, 1239.15. Aussi bien les versets 49 et 50 vont ensemble.

40 P. Roussel, l.c., p. 147, n. 1, compare déjà h. hom, à Déméter 268 ss. ɛἰμὶ δὲ Δημήτηρ τιμάοχος κτλ, mais il y a des parallèles plus significatifs encore dans les prologues d'Euripide et de ses imitateurs. A côté de la formule ἣκω (Hec. 1 ss. Ion 1 ss., Troad. 1 ss., Bacch. 1 ss.), on trouve en effet dans ces prologues la formule ἐγώ ɛἰμι, cf. Philem., fr. 91 Kock: δν οὐδὲ ɛἷς λέληθɛν…, οὖτός ɛἰμ᾽ ἐγὼ Ἀήρ, κτλ, Menand., fr. 545 K.: Ἔλɛγχός ɛὶμ᾽ ἐγώ, κτλ, Frg. Adesp. 154 K., III p. 439: ἀμορφότατος τὴν ὄψιν εἰμὶ γὰρ Φόβος, Philyll., I p. 784 K.: βούλɛσθɛ δῆτ᾽ ἐγὼ φράσω, τίς ɛἰμ᾽ ἐγώ; ἡ τῶν προτɛνθῶν Δορπία καλουμένη, Plaut. Aulul. 2 ego Lar sum familiaris sq., Trinumm. 6 nunc igitur primum quae ego sim … dicam sq. Avec Weinreich, O. (De dis ignotis, ARW, XVIII, 1915, p. 42Google Scholar), on peut rapprocher de ces prologues les déclarations des annonciateurs de “Bonne Nouvelle” comme Simon le Magicien (Acta Apost. Apocr., I, p. 132.10 Lipsius): ἐγώ ɛἰμι ὁ υἱὸς τοῦ θɛοῦ ὁ ἐκ τοῦ οὐρανοῦ καταβάς (cf. Ev. Joh. 8, 42) ou les prédicateurs ambulants dont parle Celse ap. Orig. VII 9 (p. 55.12 Glöcknsr): ἐγὼ ὁ θɛός ɛὶμι ἣ πνɛῦμα θɛῖον … ἐγὼ δὲ σῶσαι θέλω (sur ces textes, cf. Reitzenstein, Poimandres, p. 222 s., Norden, Agn. Theos, pp. 188 ss.: il est amusant de comparer la fable du chien et de la brebis dans Xen. Mem. II 7, 14 τὸν κύνα οὖν ἀκούσαντα ɛὶπɛῖν, Nαὶ μὰ Δία᾽ ἐγὼ γάρ ɛἰμι ὁ καὶ ὑμᾶς αὐτὰς σὼζων). Ces parallèles donnent le ton de notre morceau. Isis n'est pas proprement salvatrice, mais elle annonce elle aussi une “Bonne Nouvelle”: elle a fondé la civilisation.

41 ἡ τύραννος πάσης χώρας. Ce peut être ou toute la terre d'Egypte (Harder, p. 35, n. 6) ou “tout pays,” toute la terre (ainsi ont compris Andros, v.7–9, Cyrène [Peek, p. 129], v.4–8). Même si, à I'origine, π. χ. n'a visé que l'Egypte, dans notre inscription le sens “toute la terre” me semble plus probable. D'emblée Isis revendique ses droits au culte: elle est reine de tout pays. τύραννος n'est pas ici péjoratif (βασίλισσα Diod.) et ne fait pas contradiction avec M 25.

42 Cf. Diod. I 14, cité supra, n. 30.

43 Sur ce point, cf. Roeder, s.v. Sothis ap. Roscher, Lex. Myth.

44 On notera aussitôt la composition trinaire: on la retrouve en d'autres sections, comme l'a observé déjà Harder, p. 46, n. 4.

45 Dans cette section B2 ont été inclus deux paragraphes (51 enceinte des villes, 52 Isis Thesmophoros) qui reviennent apparemment à la section C, mais cf. plus loin le parallèle en A qui offre un ordre meilleur, résultant sans doute d'une copie plus correcte.

46 L'expression θαλάσσια ἔργα a une saveur homérique, cf. Il. II 614 οὔ σφι θ. ἔργα μɛμήλɛι, Od. V 67 κορῶναι ɛἰνάλιαι, τῇσίν τɛ θ. ἔργα μέμηλɛν.

47 Peut-être la reprise de ce thème (28 ἐγὼ τὸ δίκαιον ἱσχυρότɛρον … ἐποίησα) quasi au milieu de la section C (16–38) est-elle intentionnelle, marquant ainsi une sorte de pause. Mais c'est peut-être chercher là trop de raffinement.

48 Les deux vont ensemble dans la tradition grecque: Déméter apporte le blé (d'où en conséquence, suppression de l'anthropophagie) et enseigne les mystères. Il semble bien que le poète d'Andros ait suivi (d'après son modèle) le même ordre, cf. Peek, pp. 51 ss.

49 Sur la puissance du dieu Ὄρκος = Ἄιδης, cf. outre Roscher, I, 2742 (insuffisant), voir surtout Zielinski, Exkurse zu den Trachinierinnen, Philol. LV, 1896 = Iresione, I, p. 291, n. 1 (ad. Trach. 255).

50 Ou droit d'asile? (sic Harder, p. 47, n. 2): ἐγὼ τοὺς δικαίως ἀμυνομένους τɛιμῶ. Mais cf. 34 ἐγὼ τὸν ἀδίκως ἐπιβουλɛύοντα ἄλλῳ ὑποχɛίριν τῷ ἐπιβουλɛυομένῳ παρέδωκα. Ici encore M. Harder (p. 27) voit quelque chose d'oriental, de non grec: “auch die Griechen sahen den Rechtsstreit als Kampf, aber der Sieg in diesem Kampf wird (in der idealen Vorstellung) doch nicht in dieser (an Magie erinnernden) Weise ausgekostet.” Quoi de magique en cet ὑποχɛίριον? N'est-ce pas un principe du droit privé grec (δίκη au sens propre, distingué de γραφή) que la cité n'intervient que si la personne lésée elle-même, ou son représentant légal, intente le procès, fait la citation, prend la parole à l'audience (cf. Glotz, La cité grecque, p. 272)? Et l'habeas corpus n'est-il pas de mise en cas de flagrant délit? Cf. Thalheim, P.W., s.v. δίκη (V 577 ss.), ἀπαγωγή (I 2660).

51 L'expression a une saveur orientale, cf. dans l'A.T. Job 28.15 ss., Psalm. 118,72 ἀγαθόν μοι ὁ νόμος … σου ὑπὲρ χιλιάδας χρυσίου καὶ ἀργυρίου, Prov. 3, 14 κρɛῖττον γὰρ αὐτὴν (sc. τῆν σοφίαν) ἐμπορɛύɛσθαι ἢ χρυσίου καὶ ἀργυρίου θησαυρούς, Sap. Sal. 7, 10, mais les équivalents purement grecs ne manquent pas, Esch. Choeph. 372 ταῦτα μέν, ὦ παῖ, κρɛίσσονα χρυσοῦ … φωνɛῖς et les parallèles cités par Headlam-Thomson, , The Oresteia (Cambridge, 1938), II, p. 192Google Scholar (en particulier Aristote, h. à Herméias [= fr. 675 R2], v.7 καρπόν τ᾽ ἰσοθάνατον χρυσοῦ τɛ κρɛίσσω). Ajouter le début de la Ie Olympique de Pindare, que tout petit Grec devait savior par coeur, ἄριστον μὲν ὔδωρ, ὁ δὲ χρυσὸς αἰθόμɛνον πῦρ ἄτɛ διαπρέπɛι κτλ. et les vers cités dans la Ie Lettre du Ps. Platon, 310 a 4 οὐ χρυσὸς ἀγλαὸς …, οὐδ᾽ ἀδάμας οὐδ᾽ ἀργύρου κλῖναι πρὸς ἀνθρώπων δοκιραζόμɛν᾽ ἀστράπτɛι πρὸς ὄψɛις … ὡς ἀγαθῶν ἀνδρῶν ὁμοφράδμων νόησις.

52 ἐγὼ διαλέκτους Ἕλλησι καὶ βαρβάροις διɛταξάμην (J: ἕταξα K). M. Harder (p. 21, n. 1 et p. 34) fait grand état de cette variante διɛταξάμην: il s'agirait d'une tradition égyptienne selon laquelle les langues ont été divisées entre les hommes (non données aux hommes) par la divinité (Harder, après Roussel, p. 147, cite un hymne d'Aménophis IV en l'honneur du dieu Aton). C'est possible, mais διɛταξάμην et ἔταξα reviennent au même sens “j'ai disposé, j'ai arrangé” (la variante n'a guère plus de portée qu'en M 14 συνɛταξάμην K S: συνέταξα J, M 18 δɛκαμηνιαῖον K S: δɛκάμηνον J, M 27 μυήσɛις ἐπέδɛιξα K S: μυήσɛις ἀνέδɛιξα J), et βαρβάροις peut difficilement avoir été conçu par un non Grec (Roussel, P. 147).

53 Sic iure Peek, p. 69: θɛσμοφόρον A.

54 Norden, Agnostos Theos pp. 168 ss. Voir au surplus, outre l'article Hymnos de Wünsch (P.W., IX 140 ss.), Keyssner, K., Gottesvorstellung und Lebensauffassung im griech. Hymnus (Würzb. Stud., II, 1932)Google Scholar, Amann, J., Die Zeusrede des Ailios Aristides (Tüb. Beitr., XII 1932Google Scholar), Neustadt, E., Hermes, LXVI, 1931, pp. 387Google Scholar ss. (à propos de l'hymne de Cléanthe). Il est intéressant de noter que les rhéteurs de l'époque impériale, Quintilien, Alexandre, Ménandre (et le Ps. Ménandre), s'accordent encore pour distinguer dans l'hymne trois τόποι principaux: 1) la nature (φὑσις) et le γένος du dieu, 2) sa δύναμις, 3) ses ἔργα ou ɛὑρήματα, cf. Alex., p. 4.26 ss. Spengel (φύσις et γένος), p. 5.27 (δύναμις, ἔργα), p. 6.2 (ɛὑρήματα).

55 Pour le salut à un pays, Roussel comparait déjà l'hymne IV (á Délos) de Callimaque: invocation à Délos, v.1 ss.; χαῖρɛ final, v.325.

56 Cf. K. Keyssner, op. cit., pp. 29, 36.

57 Prom. 112–113: τοιῶνδɛ ποινὰς ἀμπλακημάτων τίνω | ὑπαιθρίοις δɛςμοῖσι προυσɛλούμɛνος, 437–440: συννοίᾳ δὲ δάπτομαι κέαρ | δοῶν ἐμαυτὸν ὦδɛ προυσɛλούυɛ. νον. | καίτοι θɛοῖσι τοῖς νέοις τούτοις γέρα | τίς ἄλλος ἣ ᾽γὼ παντɛλῶς διώρισɛν;

58 Cf. en dernier lieu Daux, G., Delphes au IIe et au Ier siècle (Paris, 1936), pp. 363Google Scholar ss. Texte des considérants du décret, F.D., III 2, 69 (= Syll.3; 704 E), 1. 11 ss.: ib., p. 370 (n. 2 de la p. 369) ; traduction et commentaire: ib., pp. 369 ss. (j'ai reproduit cette traduction sauf deux légères modifications).

59 ἐπɛιδὴ γɛγονέναι καὶ συνɛιλέχθαι τɛχνιτῶν σύνοδον παρ᾽ Ἀθηναίοις συμβέβηκɛ πρῶτον. Plus tard, un autre décret amphictionique amplifiera la formule: Ces technites d'Athènes “ont été les premiers inventeurs de toute culture humaine et les fondateurs des concours scéniques” (πρώτους αὐτοὺς ɛὑρɛτάς γɛγονέναι πάσας παιδɛίας καὶ σκανικῶν ἀγώνων κτιτάς), Syll.3 711 L (106/5) = 728 K (97/6).

60 Plus probablement que le gouvernement ptolémaïque lui-même. Voir sur ce point les prudentes réserves de P. Roussel, Cultes égyptiens à Délos, pp. 239 ss., RHLR, VII, 1921, pp. 37–39.

61 C'est un prêtre égyptien qui en introduit le culte à Délos; en revanche, la fondation d'un Sarapiéion, dont parle la lettre de Zoïlos d'Aspendos à Apollonios (Zenon Pap., I (1925), n° 59034: 257 av. J.C.), est le fait d'une initiative privée.

62 Cf. l'hymne de Cléanthe passim, l'hymne anonyme à la Fortune (IVe s. av. J.C.: Berl. Kl. Texte, V 2, p. 142 = Edmonds, Lyra Graeca, III, p. 482), v.2. παγκρατὴς Tύχα. Noter ici v.15 πάντων γὰρ ἀρχὰν καὶ τὲλος ἄκρον ἔχɛις et dans l'hymne cité par Stobée (I 6.13, t.I, p. 86 W.), v.1 Tὑχα, μɛρόπων ἀρχὰ καὶ τέρμα, formule qui n'est ailleurs employée que pour Zeus. Voir aussi l'invocation de Lucrèce à Venus Genetrix (sûrement d'après un modèle grec), I 21–23: quae quoniam rerum naturam sola gubernas | nec sine te quicquam dias in luminis oras | exoritur.

63 Peut-être aussi 48 ἐγὼ τοὺς ἐν δέσμοις λύω: mais est-il sûr qu'il s'agisse de liens magiques?

64 Sur ce point, cf. Norden, Agn. Theos, pp. 186 ss. Je n'ai pu consulter la dissertation d'Ed. Schweizer, Ego eimi, Göttingen, 1939.

65 Le nom par lui-même ne prouve pas qu'il s'agisse d'un Grec, et non d'un prêtre, égyptien: cf. le cas de l'Apollonios de Délos, ὣν Aὶγύπτιος ἐκ τῶν ἱɛρέων qui, vers le début du IIIe s., apporta de Memphis des objets sacrés très anciens (αὐτὸς δ᾽ οί δηναιὰ πατὴρ ἐκόμισσɛν ἀπ᾽ αὐτῆς Mέμφιδος, IG. XI 1299, 37–38); il a pour fils et successeur un Démétrios, et celui-ci un second Apollonios. Néanmoins, il se peut que le Démétrios dédicant de l'arétalogie de Kymé ait été un dévot d'Isis grec. Songeons en ce cas que, l'inscription étant longue, la gravure en devait être coûteuse. On comprendrait donc que le prêtre local, qui sans doute détenait le document, profitât des bonnes dispositions d'un dévot grec pour faire graver le texte.

66 On ne peut descendre plus bas, puisque l'hymne d'Andros, et done son modèle en prose, contient déjà ce trait, cf. v.171 ss. Or cet hymne paraît être de l'époque d'Auguste.

68 RHLR, VII, 1921, p. 41.