Trop souvent, la vie économique des sociétés antiques se dérobe à l'enquête de l'historien désireux de s'appuyer, sur des données précises, c'est-à-dire sur des faits matériels ou, mieux encore, sur des chiffres. Quoi qu'il en ait, il lui faut se rabattre, principalement pour les sociétés classiques de la Grèce et de Rome, sur les textes littéraires. Vagues, se bornant à traduire des impressions d'incompétents, ils sont, en même temps, encombrés de poncifs pieusement transmis d'un écrivain à l'autre. On n'en voudrait pas moins verger au dossier de la viticulture italienne un texte qui ne semble avoir retenu jusqu'ici l'attention de personne et dont l'analyse critique révèle, pourtant, qu'il est moins négligeable que beaucoup d'autres ordinairement invoqués.

Comme l'histoire change vite ! Et quel bonheur de la voir ainsi se transformer rapidement, au cours d'une vie d'homme ; quel magnifique témoignage de sa vitalité !

Il y a les grandes hypothèses, qui suscitent les grandes controverses. Dopsch contre Pirenne. Et bien d'autres. Ne sous-estimons pas leur fécondité. Elles cristallisent brusquement autour d'une idée simple toute une masse de faits en suspension dans un certain milieu. Elles sont le fait, elles ne peuvent être le fait que de puissants esprits. Elles qualifient, seules, les grands historiens. Et par leur simplicité, leur ampleur aussi, ce qu'elles ont de saisissant et d'illuminant — elles viennent témoigner heureusement de la raison d'être de l'histoire et de ses architectes.

Les grands livres n'abondent pas. Parce qu'il n'est que le tome premier d'un ouvrage qui doit comporter au moins deux autres volumes d'importance comparable, je ne dirai pas que le gros volume de six cents pages, enrichi d'une cinquantaine de remarquables graphiques, que notre collaborateur C.-E. Labrousse a publié aux Presses Universitaires sous ce titre : La Crise de l'Economie française à la fin de l'Ancien Régime et au début de la Révolution, nous promet un grand livre. Je dis qu'il en est un dès maintenant, tel qu'il est : un qui se suffit largement à lui-même ; un qui, si par accident il devait rester isolé, n'en aurait pas moins apporté, dans le champ de nos études économiques et sociales, un monceau de gerbes vraiment impressionnant.

Je suis persuadé que beaucoup de nos lecteurs se demandent ce qu'est l'U.N.E.S.C.O. Et peut-être trouveront-ils bienvenu d'abord un petit précis de cette institution.

U.N.E.S.C.O. est l'abréviation de la formule anglaise signifiant : Organisation des Nations Unies pour l'Éducation, la Science et la Culture. L'U.N.E.S.C.O., pourtant, n'est pas rattachée à l'O.N.U. Organisme indépendant, elle a son budget propre voté par des délégués des Etats membres. L'U.R.S.S., qui appartient à l'O.N.U., n'est pas entrée encore à l'U.N.E.S.C.O.

L'élément permanent de l'U.N.E.S.C.O. est constitué par un secrétariat général installé à Paris, à l'hôtel Majestic. Jusqu'en octobre 1946, ce secrétariat, qui n'avait alors qu'un caractère provisoire, était installé à Londres. Ainsi s'explique l'abondance du personnel anglais actuellement en fonction dans beaucoup de postes intermédiaires de ce secrétariat général. Les emplois plus modestes sont assez largement occupés par des Français. Les postes, supérieurs font l'objet des principales délibérations internationales sur la répartition des influences.

Il n'y a pas qu'en France qu'on parle de réforme. L'Université de Chicago nous envoie, elle aussi, un beau projet dont elle espère une amélioration appréciable du sort de l'humanité, non pas sur le plan américain du bonheur matériel et de la santé, du Health and Wealth pragmatiste, maïs sur le plan éternel des idées générales. Ce n'est pas parce que les difficultés actuelles de la France nous rendent peut-être un peu trop matérialistes, au sens américain du mot, que nous devons négliger d'écouter cette vaix, qui nous revient, comme un écho, d'Extrême-Occident. Nous souhaitons bonne chance aux initiateurs de la réforme, et en particulier à John U. Nef, ami de la France, qui n'est pas un inconnu pour les gens de cette maison.

En Italie, le grand domaine ecclésiastique ou le grand monastère, centres d'exploitation agricole, n'ont jamais eu la même importance que dans les pays transalpins. Aussi bien, l'historiographie italienne n'a consacré que peu d'études, et le plus souvent insignifiantes, à l'évolution de la propriété ecclésiastique. Une enquête approfondie sur les vicissitudes de la propriété foncière ecclésiastique en Italie n'en apporterait pas moins des éléments de grande valeur historique et des points de vue assez neufs.

Mais une telle recherche est difficile, compliquée aussi à cause de ce très vif contraste qui, ici, sépare une fois de plus l'évolution historique du Nord de celle du Sud de l'Italie. Il suffit d'en juger d'après les résultats : dans le Nord, dès le milieu du XVIe siècle, l'Église ne possédait plus que de 10 à 15 pour 100 des terres ; dans le Sud, au contraire, et jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, elle en possédera de 65 à 70 p. 100.

Lé paludisme est la maladie la plus répandue dans le monde actuel. C'est celle qui fait, de loin, le plus de victimes. Elle pèse lourdement sur la vie économique et sociale de bien des régions du globe. En particulier dans les pays tropicaux et méditerranéens. Mais le paludisme sévit partout ; lors de son extension la plus grande il atteignit le 66° de latitude Nord (épidémie de Haparanda, 1861). Dans l'hémisphère Sud il ne dépasse guère le 40°. Cependant, dans cette vaste zone, sa répartition n'est pas uniforme. Et il faut ajouter que, s'il est dû à trois parasites différents, le plus dangereux, Plasmodium falciparum, est tropical et méditerranéen. Dans l'Europe tempérée, on a affaire à P. vivax, agent de la tierce bénigne, et plus rarement à P. malariae, agent de la fièvre quarte. C'est le cas delà France continentale.

Entre les dernières années du XIIIe siècle et le milieu du XVe, le Pordelais représente un enjeu de marque dans l'interminable conflit qui oppose les Plantagenets puis les Lancastres aux Valois. Secteur vital de la Guyenne anglaise, il voit déferler à neuf reprises les troupes françaises sur une partie de son territoire et subit, à côté des épreuves apportées par la guerre, « maints autres grands tourments ». Sous la pression brutale des événements, sous l'influence aussi d'une évolution économique bien antérieure au XIVe siècle, de profondes transformations s'accomplissent dans le monde des possesseurs fonciers, qui, vivant essentiellement des droits sur la terre ou de la culture du sol, ont pour cadre principal la seigneurie. Ces transformations se retrouvent alors, avec des nuances multiples, dans toute la France.

Au XVIe et au XVIIe siècle, l'Espagne se veut « européenne », « occidentale », chrétienne, libérée de son lourd héritage musulman. C'est là une des grandes ambitions de son effort de civilisation au Siècle d'Or, et si l'expulsion des Morisques en 1609-1614 en est l'aspect dramatique, il en est d'autres. Sur cette grande vie des civilisations, pas de meilleures lumières que de grands témoignages : ainsi celui de la plus puissante des villes de la Péninsule, Seville, metropole des riches pays du Sud et des fabuleuses ressources de l'Ultramar. François Chevalier essaie, d'après les sources littéraires, d'indiquer la valeur et la portée de ce témoignage sêvillan : première reconnaissance d'un sujet, qui recèle encore d'immenses richesses. — F. B.

Nous avons publié ici même, voici un an, une petite note intitulée : Le part de la carte de pain. « Comment, écrivions-nous, le Gouvernement a-t-il pu supprimer la carte de pain, en 1946, si peu de temps avant de la rétablir avec sévérité ? Curieux problème d'histoire. » Et nous disions le vice fondamental de notre service de ravitaillement, qui n'est, sans plus, qu'un service de répartition ou de transport et qui se contente, en matière de consommation, d'un pari dont les risques d'erreur se répercutent sur l'évaluation de la production. Depuis, on a supprimé le ministère du Ravitaillement. On l'a remplacé par un commissariat à la Répartition.